Oldies But Goodies: Marvel Mystery Comics #14 (Dec. 1940)

29 novembre 2008 Non Par Comic Box

[FRENCH] On garde de Namor le Sub-Mariner l’image d’un héros amphibie qui (à part quelques changements de costumes occasionnels depuis les années 70) aurait passé le Golden Age habillé d’un simple slip de bain. C’est tout le contraire. Son créateur, Bill Everett, joua avec la formule plusieurs fois, quitte à utiliser un costume assez ridicule…

Nous sommes en 1940. Captain America n’a pas encore été inventé mais Sub-Mariner, lui, s’implique déjà dans la Seconde Guerre Mondiale et casse copieusement du nazi, dès la couverture. L’histoire publiée à l’intérieur commence alors qu’il vient de libérer une île française (pas spécifiquement nommée). Nous avions déjà vu dans cette rubrique que Namor (et donc sans doute à travers lui son auteur, Bill Everett) s’intéressait curieusement au devenir de la France occupée.

Là, visiblement lui et sa cousine Dorma (car au cas où certains l’ignoreraient Lady Dorma, femme que Namor épousera bien plus tard, est aussi sa cousine, comme Namora) viennent de mettre en déroute un groupe important de soldats allemands, qui sont immédiatement faits prisonniers par l’armée libre française. Cependant sur cette scène d’ouverture, ce qui devrait attirer votre regard de fan de comics, c’est le costume particulièrement outrancier que porte Namor. Sa tenue bleue (avec une cape rouge) s’ouvre sur une large échancrure, zébrée par des liens. On y sent un soupçon d’influence du costume de Superman. Attendez, vous n’avez pas encore tout vu… Pour l’instant, Sub-Mariner et Dorma regardent les prisonniers défiler en tenant un discours qui est curieusement assez humaniste (et pas empreint de la mentalité « c’est un ennemi, il doit mourir comme un chien » qu’on verra souvent dans les années 40). Les deux héros ont conscience qu’il s’agit de jeunes hommes qui ne sont pas foncièrement mauvais mais qui ont été poussés à la guerre par les théories de leur leader sur la « race supérieure ». L’ennemi c’est bien le nazisme mais pas le soldat du camp adverse, qui est en quelque sorte lui aussi une victime de la guerre. Il faut dire aussi qu’à l’époque les USA ne sont pas encore concernés par cette guerre et que tout çà facilite aussi un certain recul, qui sera moins de mise quelques mois plus tard.

Quelques instants plus tard Sub-Mariner arrive à la prison française pour procéder à l’interrogatoire des nouveaux prisonniers. Et là, il porte le dernier accessoire de sa tenue… Une sorte de masque à gaz aux allures porcines, qui forme comme un groin, avec des oreilles énormes et une sorte de crinière en panache. Namor pouvant tout à fait respirer hors de l’eau, ce masque ne s’explique pas. A moins qu’il soit là seulement pour impressionner ses ennemis ? Si c’est le cas, ce n’est pas efficace. En le voyant entrer dans sa cellule, un lieutenant allemand a ce commentaire: « Ah, crétin! Tu ne peux pas m’effrayer avec un costume si ridicule! ». Furieux, Namor pose son masque et cette fois le militaire, reconnaissant Sub-Mariner tient un tout autre langage, il est terrifié en le reconnaissant. Namor a en effet la réputation de briser ses adversaires en morceaux et de les regarder mourir dans d’horribles souffrances (je n’ai trouvé aucun passage qui valide cette affirmation du militaire, mais en tout cas Namor ne le détrompe pas).

Namor apprend ainsi ce qu’il veut: le lieutenant nazi dit tout ce qu’il sait et livre ainsi l’emplacement d’une base secrète de sous-marins. Après en avoir informé les forces françaises, Namor et sa cousine décident de détruire cette base… Dorma (qui respirait aussi facilement à la surface pendant le Golden Age) porte une variante de la tenue de Namor, à la différence que la sienne est verte. Mais tous les deux se lancent alors à l’aventure… en enfilant chacun un exemplaire de ce « masque à gaz porcin » que nous avons déjà évoqué. A quoi sert-il ? A rien apparemment. Ils le portent aussi bien sous l’eau qu’en dehors et sa fonction n’est jamais détaillée. Il pourrait s’agir d’une simple tenue d’apparat. Mais alors pourquoi la porter aussi bien quand ils vont à l’assaut des nazis ?

On remarquera aussi que Bill Everett ne faisait pas usage des bulles de pensée. Du coup son héros est obligé de commenter à voix haute tout ce qu’il fait, même quand il est totalement seul. A un moment il remonte même à la surface (toujours avec son masque curieux sur le visage) simplement pour dire que s’il pouvait détruire la base, ce serait un beau cadeau pour les français. Assez rapidement, son souhait est réalisé: il trouve un port où attendent pas moins de 15 sous-marins nazis. Sans se défaire de son masque, Namor attend que la nuit tombe et assomme un garde pour dérober un câble épais. Il attache ainsi les sous-marins de manière à former une sorte de cordée et les remorque ensuite… A la force des bras! Marchant au fond de l’océan, Sub-Mariner les tire derrière lui… En toute discrétion Namor a privé la base de ses sous-marins, attachés quelque part au fond de l’eau, Namor retourne au port ennemi et cambriole l’arsenal de ses adversaires, assommant un autre garde, il dérobe de nombreuses grenades puis attends l’aube et le signal de sa chère Dorma…

A l’aube, Dorma envoit un signal sous la forme d’une longue colonne de fumée. Sub-Mariner sait qu’il est temps d’agir et, de loin, balance (à nouveau à la force des bras) grenades et explosifs sur le camp adverse. Pour les allemands, c’est un peu comme si on les bombardait. Sans perdre de temps, Namor rejoint Dorma qui l’attendait avec une escouade de vaisseaux de son peuple (surnommés des « sous-marins aériens »). Namor s’installe aux commandes du vaisseau amiral puis guide ses troupes jusqu’à l’endroit où il a attaché les sous-marins nazis. Là, Namor attache le câble à son propre vaisseau et commence à remorquer à toute vitesse la petite armada. Les marins nazis, qui avaient passé la nuit à dormir sans se douter ce que si se tramait, sont réveillés par les soubresauts du remorquage. Les sous-marins sont tellement secoués que les allemands préfèrent les abandonner plutôt que de risquer d’y rester.

Arrivé à la base française, Namor (encore et toujours masqué) peut alors offrir ces sous-marins à un général (pas identifié): « J’ai pensé que vous trouveriez un usage à ces sous-marins d’occasion » explique l’amphibien au français incrédule. Puis Namor explique à Dorma qu’ils ont fait leur devoir et qu’ils doivent aller voir ailleurs, par exemple aux Etats-Unis… Mais rien, absolument rien ne viendra nous expliquer le pourquoi du comment de ce masque étrange. Heureusement que Bill Everett ne s’attachera pas trop à cette « innovation », le Sub-Mariner qu’on aurait vu ensuite s’attaquer aux Fantastic Four aurait été dur à prendre au sérieux, même si visiblement ça ne l’empêchait pas d’être efficace…

[Xavier Fournier]