Avant-Première VO: Review Betty & Veronica #1

Avant-Première VO: Review Betty & Veronica #1

21 juillet 2016 Non Par Xavier Fournier

Avant-Première VO: Review Betty & Veronica #1[FRENCH] Amies/rivales, ennemies cordiales depuis des décennies, Betty et Veronica, les deux amoureuses classiques d’Archie, reprennent du service dans une nouvelle série illimitée. C’est Adam Hughes qui s’occupe du lifting. Connu pour ses couvertures de pin-ups aux formes rebondies, le créateur sait pourtant aller au-delà des apparences et modernise le petit monde de Riverdale sans que ses habitantes perdent leur âme. A moins que la fin sème le doute sur l’une d’entre elles.

Avant-Première VO: Review Betty & Veronica #1Betty & Veronica #1 [Archie] Scénario d’Adam Hughes
Dessins d’Adam Hughes
Parution aux USA le mercredi 20 juillet 2016

Je n’ai pas spécialement été voir, fait le tour du net, mais je ne serais pas très étonné que certains enfoncent une porte ouverte et se mettent en tête qu’avec Betty & Veronica, Adam Hughes fait son « Strangers in Paradise ». Pourtant Betty & Veronica, la blonde et la brune, étaient là bien avant (depuis le Golden Age) et l’on peut raisonner inversement que Terry Moore a fait, avec SiP, sa variation de la relation entre ces deux personnages iconiques. Mais cette antériorité, à la longue, peut devenir un inconvénient. Longtemps, le monde d’Archie Comics s’est figé dans l’image dorée d’une jeunesse qui n’existait plus depuis au moins les années 50. Alors que l’éditeur revoit sa copie ces dernières années, en particulier depuis le reboot du personnage principal, Archie lui-même, il était donc logique que Betty et Veronica s’adaptent au XXI° siècle. Longtemps jeunes premières coincées, se disputant l’amour du dit-Archie, on pouvait anticiper qu’Adam Hughes – à la fois scénariste et dessinateur – allait travailler sur leur silhouette, leur donner des hanches et des seins. Seulement voilà, l’auteur ne se contente pas de travailler sur la forme (dans tous les sens du terme). Non seulement il a raisonné son style mais il dégager une tonalité bien particulière, qui repose – entre autres choses – sur les caractères.

« Yes, Archie. You can come as a sexy nurse if you like. »

Visuellement, Hughes ne se renie pas. Mais il y a dans sa narration, dans l’organisation des vignettes et des décors, des corps et des attitudes, quelque chose qui nous renvoie à certains de ses pairs et pas des moindres. Il approche un peu d’une composition à la Chris Bachalo à certains endroits, tout comme on pourra trouver quelques voisinages avec Stuart Immonen et Kyle Baker. Et puis il y a l’histoire, qui est là, qui n’existe pas que pour servir des cases et qui prend d’emblée un ton décalé avec un narrateur… disons atypique, un jeu dans la fiction et parfois des métacommentaires. C’est à dire que, sans que les deux jeunes filles soient des criminelles délirantes, la manière de raconter cet arc devrait plaire au public d’Harley Quinn, par exemple. Le chantier immédiat de Hughes, c’était de remettre en selle deux héroïnes qui, pendant des années, se sont définies surtout/seulement par le fait de désirer Archie, inspirant à leur tour d’autres triangles amoureux comme Clark/Lois/Lana et puis d’une certaine manière certains personnages de One Tree Hill/Les Frères Scott. C’était le ressort qui construisait historiquement (même si c’était un peu moins vrai ces dernières années) leur rivalité. L’auteur commence d’abord par installer les profils de Betty et Veronica, avec une très terre à terre, physique, et l’autre plus en retenue, plus rusée en un sens. Puis vient le moment d’établir une autre raison, plus philosophique, pour leur antagonisme. Hughes en profite d’ailleurs pour passer, via Betty, un commentaire sur l’intemporalité de Riverdale qui sonne comme une véritable déclaration d’intention, délimitant en quoi il entend moderniser la série tout en faisant que les personnages (Betty, Veronica mais aussi les autres habitants) restent soucieux de rester ce qu’ils sont. Le tout sans prendre un ton forcé. Il y a d’ailleurs une maîtrise certaine des dialogues, avec chaque personnage s’exprimant avec un vocabulaire ou un rythme, un sarcasme, qui lui est propre. A travers ce projet Adam Hughes déjoue les attentes de ceux qui voudraient caricaturer sa carrière et montre l’étendue de ce dont il est capable. C’est agréable à lire et à regarder. Mais avant tout malin et marrant.

[Xavier Fournier]