Avant-Première Comics VO: Review Fantastic Four #5

Avant-Première Comics VO: Review Fantastic Four #5

26 décembre 2018 Non Par Xavier Fournier

Plus d’un demi-siècle après sa création, The Thing se marie enfin avec Alicia Masters dans ce qui est par ailleurs le 650ème épisode des Fantastic Four, tous volumes confondus. Mais… on ne peut pas dire que les mariages annoncés de super-héros, de Batman à Kitty Pryde, aient vraiment été à la hauteur des promesses en 2018. Est-ce que quelque chose pourrait se glisser entre les deux tourtereaux et saboter la cérémonie ?

Fantastic Four #5Fantastic Four #5 [Marvel Comics]
Scénario de Dan Slott
Dessins d’Aaron Kuder, Mike Allred, Adam Hughes
Parution aux USA le mercredi 26 décembre 2018

Les histoires d’amour finissent mal, en général, y compris et surtout chez les super-héros. Dan Slott n’oublie pas d’ailleurs de souligner dans ce numéro double-size qu’il y a déjà un passif, un précédent mariage qui a impliqué une Alica Masters et qui a débouché sur une histoire de Skrulls des années plus tard. Alors, avec l’aide d’Aaron Kuder, Mike Allred et Adam Hughes, le scénariste se lance dans une histoire en plusieurs chapitres qui repose, en partie, sur notre propre incrédulité. Contrairement à d’autres séries Marvel ou DC, pas de sauce diluée, pas de one-shot dérivés. Ici on a « tout en un », avec d’abord une partie qui revisite le passé (c’est à dire non seulement la première rencontre de Ben et Alicia mais aussi les origines des Fantastic Four, 650ème épisode oblige), puis l’incontournable cérémonie d’enterrement de vie de garçon puis, si tout va bien, la cérémonie annoncée vers la fin, si aucun danger ne vient parasiter la chose. On retrouve bien le caractère enjoué d’un Dan Slott fan de Doctor Who. L’épisode a un peu le goût des « Christmas special » de la série télévisée anglaise mais aussi des allusions à peine voilées au Tardis « plus grand à l’intérieur qu’à l’extérieur » ou à un vocabulaire commun (l’usage de « sweetie »). Cela pourrait être problématique si c’était un vernis recouvrant tout et masquant la personnalité propre des Fantastic Four. Mais Slott donne encore et toujours tous les gages de sa joie d’écrire cette série plus qu’une autre. Peut-être, aussi, que dans la foulée il donne toute la spécificité des Fantastic Four par rapport aux autres comics. Ces personnages n’existent pas pour être cyniques. Ils existent pour la joie de la découverte et de la redécouverte. L’idée de retrouvailles n’a pas abandonné le volume actuel depuis sa relance cet été. Ici, on a tous les usuals suspects, de Spider-Man à Wundarr en passant par Thundra. Et puis Slott en profite aussi pour annuler ni vu ni connu la mort de quelqu’un sans qui ce mariage serait plus triste du côté des Grimm. Mais jusque dans les dernières pages demeure cette impression, cette question… où se cache le danger qui va venir s’interposer entre les personnages. Le danger arrive bel et bien (avec d’ailleurs un personnage que Slott fait parler un peu à la manière de son Superior Spider-Man)… Mais peut-être que les personnages sont plus forts que ça. Ou peut-être, aussi, que les comics méritent une série où les héros connaissent le bonheur. Et c’est en celà où, en dépit des apparences ou de certaines façons de dialoguer, Slott fait ici l’exact contraire d’un Amazing Spider-Man #700 ou d’un Superior Spider-Man.

« Whatever it took to get me to this exact spot… I wouldn’t change a thing. »

Mike Allred, sans singer le King, est sans doute celui des trois dessinateurs qui lorgne le plus sur des planches produites par Jack, explorant le passé, entretenant sa pertinence. Mais Aaron Kuder fait également, dans un autre style, des choix efficaces, qui vont dans le sens du caractère enjoué de l’histoire. On le verrait bien faire un run sur le long terme avec ces personnages. Enfin, Adam Hughes joue dans un registre bien différent de celui qu’on lui aurait confié il y a quelques années. Si la plastique de Thundra n’est pas absente, il dessine bien la soirée « entre mecs » et fait l’impasse sur les facilités d’usage, préférant une ambiance plus sombre, plus « nocturne », que ce qu’on lui connait d’habitude. Il y a quelque chose de doux-amer à lire cet épisode à la volonté résolument optimiste alors que, par la force des choses, les comics Marvel portent ce mois-ci un bandeau noir en signe de deuil, à la suite de la mort de Stan Lee. Mais c’est un hommage, clair et net, à l’attention non seulement de Stan Lee, de Jack Kirby mais aussi de Joan Lee et de Roz Kirby. C’est aussi sans doute l’un des comics qui assument le plus les racines juives des auteurs des FF. Les mariages de Batman/Catwoman ou de Kitty/Colossus ont été décevants, disions-nous. Celui-ci, in extremis, à une semaine du réveillon, devient sans problème le mariage de l’année chez les super-héros (désolé Remy et Rogue). Pas par défaut, à cause de la faiblesse des autres, mais parce qu’il n’a pas le goût d’un coup de pub. Il a une qualité qu’aucune variant cover ou mini-série prologue ne saurait acheter. Son principal point fort ? C’est qu’il a de l’âme (plus qu’on ne peut vous le détailler ici, sous peine de spoiler), celle que lui ont apporté ses auteurs en (et depuis) 1961. Et à partir de là il n’a rien de bizarre à ce que les Fantastiques, plutôt que pleureur leurs deux créateurs maintenant disparus, se réjouissent dans le même temps de l’endurance de leur créativité.

[Xavier Fournier]