Review : Superman
8 juillet 2025Superman est attendu comme le sauveur de l’univers DC Comics au cinéma. Précurseur d’une nouvelle ère instaurée et dirigée par James Gunn, ce long-métrage a tout pour être un succès public, chez les adultes comme chez les plus jeunes. Mais sera-t-il apprécié de tous ? Nous l’espérons, car la franchise DC retrouve un second souffle.
DC RENAISSANCE
Revenons quelques années en arrière. La renaissance de l’univers DC au cinéma aurait dû se faire via le film Black Adam et son acteur/producteur principal Dwayne « The Rock » Johnson. Allant même jusqu’à forcer l’apparition d’Henry Cavill, le Superman de l’époque au cinéma, dans une scène post générique, Johnson se voulait comme le sauveur de la franchise DC Comics après que la vision de Zack Snyder, via sa trilogie Man of Steel/BvS/Justice League est échouée. Mais l’échec au box-office (et critique) de Black Adam force Warner Studios à revoir sa copie. Exit Johnson. Place à James Gunn — transfuge de Marvel et réalisateur de la trilogie Les Gardiens de la Galaxie — nommé à la tête de DC Studios aux côtés de Peter Safran. Tandis que Safran gère l’aspect financier, Gunn prend les rênes créatives. Et pour amorcer cette nouvelle ère, le duo choisit de revenir à l’icône suprême : Superman.

DES DIEUX ET DES MONSTRES
Ainsi se nomme le premier chapitre imaginé par Gunn. Si la série d’animation Créature Commandos, sortie l’année dernière (également écrite et réalisée par James Gunn) est le premier projet officiel de DC Studios, Superman est la clé de voûte qui doit lancer les prochains projets. L’histoire commence alors que Superman (David Corenswet) s’est révélé au monde trois ans auparavant. Les métahumains sont connus depuis quelques siècles dans cet univers. Notre héros vient d’empêcher le gouvernement de Borovie d’envahir la nation de Jarhanpur. Critiqué pour cette action, il va devoir convaincre l’opinion qu’il agit sans autre intention. Les choses se compliquent quand Lex Luthor (Nicholas Hoult) s’en mêle et décide de prouver que Superman est une menace extraterrestre. Au milieu de tout ça, sous son alter-ego Clark Kent, notre héros doit trouver un équilibre dans sa relation amoureuse avec Lois Lane (Rachel Brosnahan), sa collègue du Daily Planet.

L’AMOUR EN HÉRITAGE
Dès les premières minutes, James Gunn nous replonge dans son enfance et dans sa première vision de Superman au cinéma à travers le film de Richard Donner avec Christopher Reeve. En utilisant des codes graphiques et le thème musical composé par John Williams en 1978 (avec un léger remix parfois comme montrer dans les diverses bandes-annonces), le réalisateur veut montrer son amour pour les différentes versions : cinéma, série d’animation et surtout les comics, le matériel d’origine. Son Superman porte un costume coloré (et avec son fameux slip rouge par dessus), sauve la population tout en se battant avec ses ennemis, rattrape les immeubles qui s’écroulent, tout en arborant un sourire rassurant. L’univers qu’ils nous présentent à travers ce film est déjà bien établi. C’est-à-dire que les super-héros sont connus du grand public, qui ne s’étonne plus de voir, par exemple, un kaiju déambulé dans les rues de Metropolis ou encore sont prêt à évacuer la ville tranquillement, comme si cela arrivait tous les mois. Si certains gimmicks comme le thème musical évoqué plus haut sont essorés (jusqu’à en devenir légèrement agaçant à la fin), Gunn insuffle une direction visuelle rafraichissante, avec une palette de couleur flashy, tout droit issue des comics.

TAILLÉ SUR MESURE
Celui est également attendu au tournant, c’est celui qui prête ses traits au justicier kryptonien, l’acteur David Corenswet. Succédant à Henry Cavill qui a une « fanbase » importante, et qui admirent son travail dans les films de Snyder (malgré des scénarios faiblards), Corenswet a été maintes fois critiqué sur les réseaux sociaux, alors qu’il n’a été montré qu’une fraction de son interprétation. Il amène un petit truc en plus à son Clark/Superman : il est en quelque sorte « normal ». son Superman est profondément humain, faillible, accessible — à l’image du message du film. Il n’est pas un dieu intouchable, mais un homme qui doute, aime, et cherche sa place. Ce n’est pas un demi-dieu qui sauverait la veuve et l’orphelin en un claquement de doigts. C’est d’ailleurs l’image d’Épinal qu’inspire Superman pour un large public. Gunn et Corenswet en font une version plus accessible pour les spectateurs mais aussi pour la population du DCU. Face à lui, Rachel Brosnahan incarne une Lois Lane incisive, intrépide et loin de la demoiselles en détresse. Bref, une Lois en phase avec sa version papier depuis les années 80. Quand à leur nemesis, Lex Luthor, il est décrit comme vicieux, génie, stratège mais aussi jaloux. Si Nicholas Hoult tient son rôle à la perfection dans une bonne partie du film, il devient légèrement ridicule dans les derniers instants de son affrontement avec Superman. Mais on ne sait pas dire si c’est l’exagération de son jeu ou la direction d’acteur choisie par Gunn qui en demande trop.

NOUVELLE FRONTIÈRE
Superman sera-t-il le renouveau de DC au cinéma ? Ça sera au public de juger. Si le film est bien meilleur que les dernières productions DC (et ce n’est pas dur) , il n’est pas sans défaut. Loin de là. Tout d’abord, on sera un peu dérouté par le montage durant la première moitié du film. Il a été évoqué que le premier montage de James Gunn était un « Superman au jour le jour », épisodique. C’est le sentiment que l’on ressent quand les séquences s’enchaînent sans vrai fil narratif. Puis tout s’explique par la suite et on ne trouve plus aucun temps mort jusqu’à la fin. Autre côté souvent critiquer dans les films de super-héros : les effet spéciaux. On se souviendra des doublures numériques affreuses de The Flash en 2023. Ici, tout n’est pas parfait mais on est bien loin de la catastrophe numérique des autres films. Si on doit trouver un lien entre les deux, c’est que les artistes SFX des projets Warner n’aiment définitivement pas les bébés numériques. On ne spoilera pas la séquence, mais c’est l’une des scènes d’action les plus dérangeantes, par son non-intérêt et sa laideur (n’ayins pas peur des mots) et elles auraient pu largement pu être coupé au montage au profit, par exemple, de plus de scènes avec Clark Kent. Car Gunn met plutôt en avant son Superman et les autres héros existants au sein du DCU. Si Hawkgirl (Isabela Merced) et Metamorpho (Anthony Carrigan) font le taff, sans plus, c’est bien Mister Terrific (Edi Gathegi) et Guy Gardner/Green Lantern (Nathan Fillion) qui font le show. Mention spéciale à Fillion qui interprète un Guy Gardner arrogant et narcissique, calqué sur les comics (et oui, on aime sa coupe au bol). Les autres personnages, comme le staff du Daily Planet ou l’Ingénieur (transfuge du comic book Authority) permettent de donner du corps à cet univers, même si on aurait avoir plus de temps pour creuser un peu leur histoire.

Superman est donc une approche intéressante pour ce futur univers étendu des comics DC à l’écran. Pas sans défaut, on se laisse facilement emporté par le héros et son combat quotidien. Si le film ne se veut jamais incisif ou à message, le réalisateur ne peut s’empêcher de taquiner la situation politique actuelle de l’Amérique à travers les yeux de son héros, immigrés de l’espace qui se sent plus humain qu’alien, et de son ennemi, un puissant homme d’affaires aux idées bien arrêtées. Ou encore une critique du harcèlement subi par la production par les fans du « Snyderverse » à travers une petite séquence hilarante. Le film est avant-tout une déclaration amour à l’univers DC et à l’univers coloré des comics en général. À voir en famille (oui, Krypton, c’est à toi qu’on pense en évoquant les enfants), il ne fait aucun doute que ce Superman marquera sa génération, tout comme Reeve ou Cavill l’ont fait en leurs temps.
[Pierre Bisson]Superman – réalisé par James Gunn – Avec David Corenswet, Rachel Brosnahan, Nicholas Hoult, Nathan Fillion, Isabela Merced, Anthony Carrigan et Edi Gathegi – En salle le mercredi 9 juillet 2025.


