Review: Black Widow

Review: Black Widow

29 juin 2021 Non Par Pierre Bisson

Prévu en mai 2020, Black Widow devait marquer l’entrée dans la phase 4 du MCU. Si entre temps, WandaVision, Falcon et le Soldat de l’Hiver et Loki sont venus inaugurer cette nouvelle étape dans la stratégie de Marvel Studios, Natasha Romanoff est la première super-héroïne à revenir au cinéma (depuis Spider-Man en 2019). L’attente a été longue mais est-elle à la hauteur ? Il y en a un peu pour tous les goûts.

LA SOUFFRANCE TE REND PLUS FORT(E)

Le sort de Black Widow (Scarlett Johansson) est scellé depuis Avengers: Endgame. Le long métrage nous transporte donc dans le passé de l’espionne russe. Avec une introduction qui n’est pas sans rappeler la série TV The Americans, on est présenté à la « famille » de Natasha : Melina (Rachel Weisz) en bonne mère de famille, Alexei (David Harbour) en père travailleur et Yelena (Florence Pugh à l’âge adulte) en petite soeur blonde. Mais tout ça n’est qu’une façade car ce quatuor fait partie de la division secrète russe surnommée la Chambre Rouge. Des années plus tard, chacun a tracé sa route. Ils vont se retrouver pour effectuer une ultime mission : détruire la Chambre Rouge, responsable de la manipulation de milliers de jeunes filles à travers le monde.

PIQÛRE DE RAPPEL

Replaçons le cadre. Après Captain America : Civil War, Black Widow est en fuite. Au départ dans le camp d’Iron Man, elle le trahit pour permettre à Steve Rogers de résoudre l’énigme du Soldat de l’Hiver et du Baron Zemo. Accusée de ne pas respecter les accord de Sokovie, Natasha est traquée par le Général Ross (William Hurt). Si elle compte bien menée une retraite paisible, elle est vite rattrapée par son passé de tueuse à gage, par le biais du retour de sa petite soeur Yelena. Contrairement à ce qu’on aurait pu penser, le film ne se contente pas d’enchaîner les flashbacks pour retracer la vie de la Veuve Noire. Au contraire, certains éléments clés de son passé ne sont expliquées que par des échanges (que s’est-il passé à Budapest avec Hawkeye, par exemple). C’est malin, et ça permet de ne pas couper le rythme effrénée de l’histoire. Car de l’action, il y en a !! Durant le premier tiers du long-métrage, les scènes de combats et de poursuites s’enchaînent sans coupure. Puis durant le deuxième tiers, un net ralentissement se fait ressentir. Les scènes de dialogues ne sont pas inintéressantes mais traînent un peu en longueur. On peut faire une comparaison avec le repas de famille dominicale (car oui, c’est durant la scène du repas, vu dans les différents trailles) : on est content de se retrouver mais au bout d’un moment, on aimerait bien passer à autre chose mais il faut attendre que tout le monde est fini son assiette. Le dernier segment revient à une bonne dose d’explosions et combat en tout genre, made in Marvel Studios.

NOIR, C’EST NOIR

Black Widow s’inscrit dans un cadre bien particulier. Au départ, le film devait être la transition entre l’ancienne époque du MCU et la nouvelle avec ses héros inédits comme Shang-Chi ou les Eternals. Mais le virus est passé par là et a forcé Kevin Feige et son équipe a changé leurs plans. Depuis deux ans et la sortie au cinéma de Spider-Man: Far From Home, c’est sur Disney + que l’avenir du MCU se joue. Et les productions télévisuelles ont montré qu’elles n’avaient pas à rougir des sagas au cinéma. De plus, la réalisatrice Cate Shortland et son trio de scénaristes (Jac Shaeffer, Ned Benson et Eric Pearson) choisissent une période bien précise de la vie de Natasha : entre Civil War et Infinity War. Le spectateur qui connaît bien son MCU sait qu’il ne peut pas rien arriver de « grave » à la rousse incendiaire. Et pour cause, on la retrouve blonde et en pleine forme durant Infinity War.  Même les grandes phases de sa formation de Veuve ont été évoquées dans les autres films Marvel, notamment Avengers : l’Ère d’Ultron. Si du coup « Tasha » est moins intéressante, il lui fallait des acolytes à sa hauteur. Par chance, les auteurs ont également choisi d’éviter les multiples cameos et se tombent pas dans le clichés des team-up avec les autres Avengers. On découvre ici trois personnages inédits au sein du MCU, mais bien connus des fans des comics. Melina Vostokoff, incarnée par Rachel Weisz, est bien complexe que son personnage de papier. Présentée comme la doyenne des veuves noires actuellement en vie, elle est la figure maternelle du groupe. Alexei n’est pas le mari de Natasha, comme dans la BD. Plus âgé, il est un héros déchu de l’empire Russe. Seul super-soldat soviétique (si on exclut le Soldat de l’Hiver), il passe son temps à se lamenter sur son heure de gloire : un combat d’anthologie avec Captain America. Ce qui est impossible car Steve Rogers était dans la glace… Faut-il imaginer qu’il y a une histoire secrète de Steve Rogers qui se prépare ? Après tout, le Captain a bien voyagé dans le temps pour ramener les Pierre de l’Infini… David Harbour est parfait dans le rôle du Red Guardian. Au départ, en américain parfait puis se laissant pousser la barbe (et le bedaine) en rôle comique de has-been. Certains ne manqueront pas de le comparer au Thor de Endgame. Enfin, Yelena n’est pas l’adverse de Black Widow comme l’avait présentée Devin Grayson et JG Jones dans la mini-série de 1999. Au contraire, c’est elle qui vient demander l’aide de sa grande soeur. Florence Pugh insuffle une fraîcheur à l’ensemble. Cynique, émouvante et aussi « bad-ass », elle donne envie de la revoir… et a priori, c’est bien parti pour.

L’ESPIONNE QUI M’AIMAIT

Si le cahier des charges des productions Marvel est respecté : action, humour potache et émotion, Black Widow s’oriente vers une ambiance moins super-héroïque que les précédents longs-métrages. Si Nat’ regarde Moonraker dans sa caravane, ce n’est pas pour rien. Kevin Feige et sa « team » se sont clairement inspirés de James Bond et aussi de Jason Bourne. On notera que le méchant principal, Dreykov (chef de la Chambre Rouge) ressemble beaucoup à Ward Abbott (le chef du projet Bourne). Ils s’inspirent également des récents James Bond où Daniel Craig réussissait à se sortir de toutes les situations les plus périlleuses sans une égratignure. Car, c’est l’un des points les plus étranges (et le moins crédibles), les Veuves Noires dérouillent « grave » dans ce film. À tel point qu’on se demande si on ne va pas nous expliquer qu’elles aussi auraient reçu une variante du sérum du Super Soldat. Mais non, elles peuvent tomber de plusieurs mètres et ne même pas se fouler la cheville… En parlant de vilain, cette review n’a que peu évoqué l’une des figures phares du marketing du film, Taskmaster. Peu développé et avec une révélation finale qu’on voit venir au 2/3 du film, ce super-vilain est vite oublié. Dommage, car il y avait beaucoup à faire… Mais qui sait, parfois Marvel sait faire revivre un personnage laissé de côté. Si il ne plaira pas à tout le monde (et c’est bien normal) et qu’il tire un peu en longueur pour dépasser ses deux heures, Black Widow a le mérite de jouer la sécurité : une héroïne connue, un mélange de genre qui ont fait leur preuve.

[Pierre Bisson]

Black Widow – Avec Scarlett Johansson, Florence Pugh, David Harbour, Rachel Weisz, O-T Fagbenle et William Hurt – Réalisé par Cate Shortland – Sortie en salles le 7 juillet 2021 – Marvel Studios / Disney

Photos : © Marvel Studios / Walt Disney Company