Oldies But Goodies: Captain 3-D #1 (Dec. 1953)

29 décembre 2009 Non Par Comic Box

[FRENCH] Dans la galaxie des personnages créés par Joe Simon et Jack Kirby, Captain 3-D n’est pas forcément celui qui a le plus marqué les mémoires. A la base un travail de commande initié par Harvey Comics (qui voulait surfer sur la mode des films en 3D et la transposer dans les comics) cet étrange Capitaine n’aura pas duré longtemps. Dire qu’il a disparu sans laisser de traces serait par contre totalement faux puisqu’on y voit les prémices de plusieurs autres concepts, y compris les racines d’un héros Marvel…

En 1953 le cinéma américain s’était mis à la 3D. Une 3D qui n’avait rien à voir avec James Cameron et son Avatar : Le principe voulait que l’image soit dédoublée et que le public s’affuble de lunettes bicolores, avec un filtre rouge et l’autre vert. C’était le nec de la technologie et en tout cas un gadget qui allait faire illusion quelques temps avant que les spectateurs décident finalement que le tout donnait surtout un sérieux mal de tête et que la pratique passe de mode. Mais à l’époque, la 3D et les lunettes qui allaient avec semblaient promises à un bel avenir… Assez pour que l’éditeur Harvey décide de surfer sur la vague en sortant lui aussi des comic-books en 3D. L’idée singeait ce qui se faisait alors dans les salles de cinéma : des pages dessinées en noir et blanc était démultipliées en rouge et vert, nécessitant que le lecteur enfile, comme les spectateurs, les lunettes bicolores. Dans l’idéal, le dispositif était supposé produire l’effet d’une profondeur de champ. La promesse d’Harvey allait même encore plus loin dans les pages éditoriales : « Après de nombreuses années de recherches et d’expérimentations, nous vous proposons le plus étonnant magazine produit à base d’illustrations tridimensionnelles grâce à notre procédé exclusif. Le résultat reproduit une sensation de la profondeur de la VRAIE VIE jamais atteinte dans une histoire illustrée ! ». Bigre ! Ni plus ni moins que l’évocation de la VRAIE VIE (en lettres capitales)… Sauf bien sûr qu’au cinéma on voyait des acteurs, des paysages, des décors, des mouvements… Autant d’éléments qui découlaient forcément d’un réalisme photographique. La 3D appliquée à des comics, cela restait de la BD et promettre d’imiter la vie, c’était mettre la barre bien trop haut… N’empêche qu’Harvey se sentait assez en confiance pour annoncer toute une gamme basée sur cette technologie. 3-D Dolly (qui visait les filles), Funny 3-D (titre peuplé par des « Funny Animals ») ou les plus généralistes Adventures In 3-D et True 3-D. Et puis il y avait Captain 3-D, titre qui nous intéresse plus particulièrement aujourd’hui, qui visait le lectorat habituel des super-héros…

Captain 3-D était l’œuvre de Joe Simon et Jack Kirby, l’équipe créative qui avait déjà à son actif des succès comme Captain America, les Boy Commandos ou encore Sandman. D’ailleurs le titre même de Captain 3-D n’était sans doute pas totalement innocent. Là où Captain America était tombé à pic pour incarner les valeurs patriotiques de l’Amérique un peu avant son entrée dans la seconde guerre mondiale, Captain 3-D pouvait symboliser l’Amérique des années 50, à mi-chemin entre la paranoïa anti-communiste (on verra plus loin dans quelle mesure) et la confiance dans la technologie. La 3D semblait promise à « ringardiser » les héros précédents des comics. Mais le premier problème rencontré par un tel projet n’était pas d’ordre technique mais plutôt démographique ou politique. Le public qui se massait dans les salles obscures pour profiter de l’effet 3D cherchait du sensationnel, du spectaculaire. Les films concernés laissaient la part belle à l’action, au fantastique et à des effets « coup de poing ». Les spectateurs des films 3D avaient une moyenne d’âge bien plus élevée que celle des lecteurs des comics, qui plus est à une époque où les ligues de moralité multipliaient les attaques contre le « contenu violent » des BD américaines. Et pourtant, comment se priver d’effets sensationnels quand on ciblait un public intéressé par la 3D ? Harvey tenta de ménager la chèvre et le chou en expliquant que Captain 3-D était un « premier magazine en 3D étonnante qui visait principalement les garçons et les filles plus âgées. Nous pensons que cette tranche n’a pas reçue assez d’attention. Maintenant, pour les premières fois, ils seront capables de voir des histoires excitantes et pleines de suspens grâce au procédé 3D exclusif d’Harvey ». Comprenez qu’officiellement l’éditeur promettait de s’adresser à un public adolescent, plus vieux que les lecteurs de comics existants, qui ne risquait pas d’être traumatisés. A l’écouter, ce public n’avait même jamais eu de titre de BD qui lui soit destiné. Officieusement, bien sûr, Captain 3-D s’adressait à quiconque voulait bien investir quelques cents pour lire son contenu. D’autant que Simon & Kirby utilisaient les recettes qui avaient fait leur succès et ne produisaient pas spécialement un contenu extraordinairement plus complexe que pour Captain America ou les autres comics qu’ils avaient créés précédemment. Non pas qu’il faille entendre pas là que leurs BD étaient naïves mais clairement si leurs productions antérieures ne s’étaient pas adressées aux « garçons et les filles plus âgées » il n’y avait rien dans le contenu de Captain 3-D susceptible de changer la cible visée… La profession de foi d’Harvey était donc plutôt là pour rassurer les parents et les censeurs éventuels. A l’intérieur, les auteurs continuaient de faire comme à leur habitude.

Comme souvent dans les scénarios de Joe Simon, les événements sont centrés autour d’un jeune orphelin qui sera celui avec lequel les lecteurs s’identifieront. Danny Davis tient seul une petite librairie dont il a hérité. Un jour, un mystérieux inconnu pousse la porte de l’endroit en demandant à Danny s’il achète et vend des livres. Le garçon a à peine le temps de répondre par l’affirmative. L’inconnu titube et lui tend un livre en lui intimant l’ordre de conserver celui-ci et de ne le vendre sous aucun prétexte. Danny s’aperçoit que son interlocuteur est blessé mais l’autre l’interrompt, en lui expliquant que le temps est compté. D’ailleurs un autre inconnu entre dans la libraire d’occasion, sort une arme et tire. L’homme qui a confié le livre a Danny est instantanément tué et désintégré. L’assassin frappe alors Danny en lui expliquant qu’il veut le livre (c’est sans doute parce que Danny tenait l’ouvrage que son opposant n’a pas osé le désintégrer). Le tueur s’empare de l’objet convoité, l’identifiant comme le « Livre de D », dont « ils seront bientôt débarrassés pour toujours ». Mais Danny a beau être jeune, il n’est pas du genre à se laisser faire pour autant. Il saute sur son opposant et dans la cohue l’homme laisse tomber son arme. Danny la ramasse alors et le rapport de force s’inverse. L’agresseur s’enfuit alors, abandonnant aussi bien l’arme que le Livre D. L’homme fonce jusqu’à une proche voiture en s’écriant : « Patron ! Le gamin a mon révolver Gamma ! ». Mais ce qui rend réellement furieux le boss en question c’est que son homme de main n’a pas réussi à obtenir le livre. La punition est sans appel : celui qui a agressé Danny est désintégré par un autre révolver Gamma…

Danny a appelé la police à l’aide mais quand un agent arrive sur les lieux, il n’y a aucun corps (et pour cause puisqu’il s’est désintégré). Danny passe pour un gamin mythomane qui tente de faire croire à un meurtre qui ne s’est pas réellement produit. L’agent lui ordonne même de se calmer sinon il l’embarquera. Danny n’a visiblement pas l’idée d’utiliser le revolver Gamma resté dans sa boutique pour désintégrer un objet, histoire de prouver ses dires. D’ailleurs tout se passe comme si le revolver Gamma ne se trouvait plus dans la boutique. Après les remontrances de l’agent, Danny Davis se retrouve donc seul avec le mystérieux livre… Il l’ouvre mais parmi les nombreuses pages il ne trouve qu’une chose… L’image d’un homme étrangement habillé, avec les lettres « 3D » gravées sur sa poitrine. Danny trouve également une paire de lunettes bicolores glissées dans le livre: « Et ces lunettes… Elles sont identiques à celles qu’on porte pour un film en 3D » médite le jeune garçon, pour bien enfoncer le clou de la fonction de ces lunettes (les revues Harvey en 3D étaient elles-mêmes vendues avec deux paires de lunettes du même genre). Danny enfile les lunettes mais quand il regarde avec elles la silhouette représentée dans le livre, un fait extraordinaire se produit. L’homme apparemment dessiné prend du relief, commence à sortir du livre et à grandir jusqu’à atteindre une taille humaine. « Merci mon pote ! C’est une bonne chose que tu m’ai relâché à cet instant ! ». Bien sûr Danny aurait une tonne de question à poser à l’homme échappé du livre mais l’autre lui intime de se taire : « Plus tard, l’ami, tu as des visiteurs ! ». Plusieurs hommes (visiblement des complices de l’agresseur vu en début d’épisode) tentent de s’introduire dans la boutique. Mais le nouvel ami de Danny les coince dans l’ouverture de la porte. Les inconnus s’écrient : « Captain 3-D ! Il est libre ! ». Voici donc le mystérieux héros identifié par ses adversaires. Et Captain 3-D est visiblement de taille à leur tenir tête puisqu’il balaye littéralement la pièce avec ses poings. La bande ennemie est vite terrassée et Captain 3-D attache les hommes vaincus.

Maintenant que l’action est retombée, Danny peut enfin lancer la discussion : « Dîtes, vous savez vraiment bien vous battre, Captain 3-D ! Mais qui êtes-vous ? Et qui sont-ils ? ». Le héros tridimensionnel conseille alors de regarder les captifs à travers ses lunettes 3-D. Et là, c’est la surprise car quand Danny les regarde en utilisant le gadget, il les voit sous leur vrai visage… qui n’est pas humain. Les ennemis de Captain 3-D sont des hommes-chats, des membres du Peuple Chat ! Captain 3-D explique alors que cette race féline et la sienne (à mots couverts on comprend donc que le capitaine n’est pas humain) existent depuis très longtemps et qu’elles se font la guerre depuis 50000 ans. La logique est proche de ce que Jack Kirby utilisera plus tard dans diverses séries, notamment The Eternals, où il est expliqué que l’humanité cohabite depuis des dizaines de milliers d’années avec deux autres races (les Eternals et les Deviants) qui s’affrontent depuis des lustres. Le Peuple Chat occupe ici la même place que les Deviants tandis que les gens de Captain 3-D sont un peu les Eternals du récit (ou encore la Neuvième Race que Kirby utilisa un autre univers, la Secret City Saga). Mais avec une différence de taille, là où les Eternals seront une race à part entière encore en activité dans le présent, Captain 3-D s’identifie comme le dernier survivant de son peuple : « Quand tes ancêtres en étaient encore à manier la hache, nous fabriquions déjà des bombes D, à côté desquelles votre bombe atomique a l’air d’un feu d’artifice… Mais le Peuple-Chat utilisa en premier ces bombes… Rapidement mes semblables furent presque tous détruits, avec les survivants se cachant dans des cavernes ». Les derniers savants de cette race parfaite, menés par le Professeur Cinq, travaillèrent alors sur un dernier projet : l’intégration d’un champion de la race (réduit à un état de vie en deux dimensions) dans un livre spécial. Quand tout fut terminé les savants confièrent le Livre de D aux humains primitifs en leur demandant d’en prendre soin et d’empêcher que le Peuple-Chat ne s’en empare.

Rapidement le Professeur Cinq trouva la mort, tué par une patrouille du Peuple-Chat, convaincue d’avoir détruit le dernier ressortissant de la race D. Au passage, le Professeur Cinq (« Five » dans la VO) est le seul autre membre de la race D a être identifié nominalement. Et comme ce qui lui tient lieu de nom est un numéro, il n’est pas illogique de penser que le vrai nom de Captain 3-D est réellement « Trois » tandis que le D fait référence à son peuple. Mais Danny interrompt son nouvel ami pour lui poser une question qui n’est pas idiote : Si le Peuple-Chat a détruit la race de D et s’est retrouvé sans personne pour l’empêcher de prendre le contrôle du monde, comment se fait-il que la race humaine, elle, n’ait pas été réduite en esclavage ? La réponse est simple : peu de temps après la fin de la lutte contre les gens de D, le pays des hommes-chats fut ravagé par un terrible tremblement de terre et disparut dans l’océan. Les rares ressortissants du Peuple-Chat furent obligés de se cacher dans la clandestinité en portant du maquillage et en se faisant passer pour des humains… Mais leur objectif demeure : conquérir la race humaine ! Un flashback nous montre alors les hommes-chats à l’époque de la chevalerie, portant des armures médiévales et torturant des humains pour essayer de leur faire avouer où était caché le Livre de D. Puisqu’au moment de la port du Professeur Cinq le Peuple-Chat était convaincu d’avoir anéanti le dernier survivant de D mais qu’au Moyen-Age ils avaient appris l’existence du livre et qu’en plus les intrus capturés dans la boutique connaissaient déjà le héros sous le nom de Captain 3-D, l’implication est que le héros serait sorti du livre quelques fois au cours des siècles pour contrer le Peuple-Chat. Mais rien n’est réellement précisé dans ce sens. Notons aussi que la vision de ces êtres-chats portant des armures de chevalier nous renvoie également à un autre concept plus tardif de Jack Kirby, à savoir les Knights of Wundagore (des êtres mi-hommes, mi-animaux portant eux aussi des armures et généralement associé au High Evolutionary de Marvel).

Mais les différents gardiens du livre (qui se transmettait de père en fils) furent rusés et jamais le Peuple-Chat n’arriva à mettre la main sur l’ouvrage. En fait on se dit que si le dernier gardien en date avait été si malin, plutôt que de perdre du temps à chercher une librairie pour y cacher l’objet, il aurait pu lui-même mettre les lunettes et lâcher Captain 3-D sur ses poursuivants mais le scénario ne semble pas prendre en compte cette possibilité. Mais puisque les êtres-chats ont finalement tué le gardien, Danny devine rapidement qu’il est du coup le nouveau gardien, ce que lui confirme Captain 3-D avant de retourner dans le Livre de D, redevant une illustration immobile et en deux dimensions. « Il est retourné dans le livre ! Je me demande pourquoi ? » rumine Danny… qui pourrait aussi bien mettre à nouveau les lunettes 3D, l’invoquer de nouveau et lui poser la question. Mais sans doute que dans son subconscient il sait déjà qu’on ne doit déranger le bon Captain qu’en cas de danger…  Le narrateur conclut cependant en insinuant que ce non-dit est un « étonnant secret qui sera révélé quand Captain 3-D reviendra à la vie ». En fait, les deux autres histoires que contiennent le numéro ne donneront aucune précision à ce sujet et dans la dernière d’entre elle il n’y a carrément aucune référence au fait que Captain 3-D sortirait d’un livre ou y retournerait. Et il n’y aurait pas d’autres numéros de Captain 3-D, Harvey Comics ayant visiblement surestimé l’étendue de la mode 3D. Et puis, comme déjà évoqué en préambule, les comics essuyaient de nombreuses critiques concernant leur prétendue violence et leur caractère traumatisant. Une série mettant en scène des monstres comme le Peuple-Chat et des corps représentés en train de fondre sous l’effet de rayons désintégrants, c’était sans doute bien trop corsé pour certains bien-pensants. Quoi qu’il en soit, Captain 3-D resta donc de fait un « one-shot » sans lendemain…

Ou en tout cas sans suite directe et/ou officielle. On ne peut pas pour autant dire qu’il n’ait pas laissé de trace. D’abord Captain 3-D est un jalon dans l’œuvre de Jack Kirby, donnant des signes de divers concepts plus tardifs du King. Nous l’avons vu, on y croise des éléments qu’on retrouvera plus tard exploités de façon similaire dans The Eternals, la Secret City Saga ou bien d’autres. D’abord les scènes montrant la guerre totale, destructrice, opposant deux races pratiquement disparues par la suite relèvent d’une marotte de Kirby et de Simon. On retrouvera des scènes du même ordre dans Adventures of the Fly #1 au point qu’il ne serait pas impossible d’unir le tout dans une sorte contexte commun, la race D, le Peuple-Chat et les hommes-mouches alliés de The Fly ayant tout aussi bien pu s’affronter dans un conflit global, 50000 ans dans le passé. L’histoire de Captain 3-D, bâtie sur une guerre ancienne, fait aussi penser aux mécanismes scénaristiques qui animent l’histoire des New Gods (série de Kirby chez DC qui s’ouvrait avec la description d’une guerre meurtrière). D’ailleurs puisqu’on parle des New Gods et donc du « Fourth World » dans lequel ils s’inscrivait chez DC, Captain 3-D comporte aussi diverses similitudes avec un autre personnage de cet univers: le Infinity Man, l’allié des Forever People (série-sœur des New Gods). Là où Captain 3-D est enfermé dans un livre, le Infinity Man est invoqué par les Forever People par l’intermédiaire d’une « boîte-mère », accessoire propre aux New Gods. Et (mais c’est peut-être un pur hasard) une des publicités annonçant les épisodes de Captain 3-D finalement jamais parus faisait mention d’un combat contre un être nommé Infinity.

Un autre héros laisse peu de place au doute quand à sa filiation avec Captain 3-D. Dans les années 70, Roy Thomas cherchait à muscler un peu la chronologie de l’univers Marvel en expliquant qui avait bien pu défendre la Terre des menaces extraordinaires avant que les Fantastic Four entrent en action. Pour la période de la seconde guerre mondiale, pas de problème : Marvel disposait déjà de plusieurs héros-vedettes comme Captain America ou Sub-Mariner qui avaient été actifs à cette période. Il suffisait donc de les réunir au sein d’une même équipe, ce qui fut fait en 1975 à travers le lancement rétroactif des Invaders.

Pour les années 50, c’était plus compliqué car Marvel avait produit beaucoup moins de héros identifiables à cette époque. Le plus reconnaissable était Marvel Boy. Mais il se trouvait que Roy Thomas l’avait tué dans un épisode des Fantastic Four après avoir montré qu’il était fou (Heureusement pour Marvel Boy cette histoire a depuis été « corrigée » et le héros est actuellement actif au sein des Agents of Atlas sous le nom de code d’Uranian). A l’époque il semblait difficile de baser un concept sur un « héros » dont on savait qu’il serait destiné à devenir, adulte, un fou meurtrier. L’alternative, c’était de créer un héros neuf qui aurait été actif dans le milieu des années 50 et dont la chronologie restait vierge de toute référence. Un héros qui pourrait incarner la paranoïa de l’époque (quand l’Amérique voyait des espions infiltrés un peu partout) et qui serait aussi le reflet du folklore culturel de l’époque. Comme, par exemple, la fameuse 3D qui avait eut son heure de gloire à l’époque…

En 1977, dans les pages de Marvel Premiere, Roy Thomas réinventa donc de manière totalement assumée Captain 3-D sous le nom de 3-D-Man. Scénaristiquement parlant, deux grosses différences séparent surtout les deux héros. Captain 3-D est prisonnier, incrusté dans les pages d’un livre et il faut porter des lunettes 3-D pour le matérialiser. 3-D-Man, lui, n’est pas le dernier survivant d’une race oubliée mais un pilote d’avion victime d’extra-terrestres. Il est directement incrusté dans une paire de lunettes qu’il faut enfiler pour qu’il s’en échappe. L’autre dissemblance apparente est dans le choix des ennemis. 3-D-Man ne lutte pas contre le Peuple-Chat (encore qu’il aurait pu, un équivalent du Peuple-Chat existant par ailleurs dans l’univers Marvel) mais contre les extra-terrestres Skrulls, qui sont capables de prendre n’importe quelle apparence. Mais si pour la version Marvel la menace est d’origine « alien », le mécanisme est le même. Là où Captain3-D et Danny pouvaient démasquer les hommes-chats en portant des lunettes 3D, 3-D-Man peut détecter la présence des Skrulls et voir à travers leur déguisement grâce aux lunettes (elles aussi « 3-D », forcément) qu’il porte. La portée de Captain 3-D/3-D Man dans l’univers Marvel moderne est encore tangible de nos jours puisqu’en 1998, dans Avengers vol.3 #8, Kurt Busiek a inventé une sorte d’héritier de 3-D-Man : un héros d’abord nommé Triathlon qui avait des pouvoirs similaires. On récemment revu Triathlon dans la série Avengers: The Initiative, dans laquelle il assumait totalement son héritage spirituel en devenant le nouveau 3-D-Man et en décidant de porter les lunettes de son prédécesseur. Décision judicieuse puisqu’une fois lancé dans Secret Invasion, ces bésicles allaient lui servir pour démasquer les Skrulls infiltrés, reproduisant ainsi un geste que Danny Davis avait été le premier à faire en 1953… Autant dire que sans l’existence préalable de Captain 3-D, c’est (au moins) tout un arc d’Avengers: The Initiative qui aurait eu un contenu très différent.

[Xavier Fournier]