Avant-Première Comics VO: Review Nightwing #57

Avant-Première Comics VO: Review Nightwing #57

24 février 2019 Non Par Xavier Fournier

Désormais amnésique, Richard Grayson entend bien être défini seulement par ses décisions présentes et pas parce qu’il a pu être par le passé. Une décision qui, forcément, ne fait pas le bonheur de Barbara Gordon et des autres ex-alliés de Nightwing. Puis les ennemis venus du passé eux non plus ne sont pas prêts à effacer l’ardoise. Prenez la Fille du Joker, par exemple…

Nightwing #57Nightwing #57 [DC Comics]
Scénario de Scott Lobdell & Zack Kaplan
Dessins de Travis Moore
Parution aux USA le mercredi 20 février 2019

Mettre Richard Grayson de côté ou, en tout cas, le dégager de la Bat-famille, c’est une marotte cyclique de l’équipe éditoriale de Dan Didio cette dernière quinzaine d’années. La dernière approche en date est de profiter du fait que le personnage ait été blessé à la tête. Désormais une vraie tabula rasa et un brin plus cynique, Nightwing ne veut plus se faire surnommer « Dick », c’est dépassé, il préfère Ric. Magie de l’amnésie dans les comics, le sieur Grayson a oublié tout l’affect qu’il avait envers Bruce Wayne et les autres ressortissants de la Bat-Famille sans pour autant que ses aptitudes, son expérience et son instinct soient « gommés ». Il veut défendre Bludhaven comme il l’entend, sans qu’on lui parle de qui il était « avant ». Dans cette optique, voir rappliquer la Fille du Joker est une idée assez bien venue, une sorte de commentaire méta de la situation de Grayson. A l’origine, il y a une ou deux continuités en arrière, la Fille du Joker a fait ses débuts dans les aventures solo de celui qui était alors seulement Robin. Et puis, en particulier depuis que les New52 en ont fait une sorte de variation d’Harley Quinn, la « Fille » est devenue une sorte d’ultra-fan du Joker, un personnage totalement obsédé par l’image de son idole, au point de continuer de porter la peau du visage arrachée du prince du crime. La Fille du Joker est l’image d’une admiration dévorante. A l’inverse, Ric Grayson est, lui, un ancien sidekick qui ne veut plus être traité comme tel et qui refuse de s’effacer pour correspondre aux souvenirs des autres. Ils sont donc d’un côté d’anciens adversaires-alliés dans une continuité oubliée (à l’image des souvenirs grillés de « Ric ») et – de l’autre – ce sont deux parfaits opposés. L’exécution de Lobdell et Kaplan est efficace et surtout superbement mise en image par un Travis Moore qui donne de la pêche même aux moments les plus intimistes de l’histoire (par exemple la scène sous la neige, dans le parc).

« What exactly did he tell you about me? »

On peut aimer ou ne pas aimer la décision initiale de tirer un trait sur la mémoire de Grayson (encore que sur le long terme on serait quand même étonné que ça tienne). D’une certaine manière, virer l’optimisme classique de Grayson pour en faire un personnage moins altruiste, c’est un peu comme créer un « Red Hood bis » alors qu’on a déjà Jason Todd pour ce genre d’angle. Mais la mise en place de l’idée, épisode après épisode, fonctionne bien, d’autant que Moore fait des merveilles au dessin. A la réflexion, le problème n’est forcément de transformer « Ric » en « Jason Todd ». Si on y regarde bien, ce héros amnésique, amoureux d’une jeune femme qui fait dans le social, c’est surtout une reprise de l’idée de Scott Snyder pour la dernière année de son run sur la série régulière Batman, quand Wayne était lui-même privé de mémoire et entiché de son ex-fiancée, désormais elle aussi dans le social. On reconnaîtra cependant à Lobdell et Kaplan de porter cette idée sur un registre un peu plus « noir », plus thriller urbain. Richard Grayson n’est pas Bruce Wayne. Il est possible que l’idée dure sur ce titre un peu plus longtemps. En tout cas, elle est pour l’instant efficace.

[Xavier Fournier]