Arrivé dans Flash pour y jouer Jay Garrick, vous incarnez finalement un personnage à plusieurs visages. Où plusieurs personnages avec la même tête. En tant qu’acteur, comment aborde-t-on cette dualité ?

J’étais excité d’avoir cette opportunité. Je n’étais pas sûr d’y arriver. Je ne savais pas comment cela allait évoluer au fil de la saison. J’ai pris ce qu’ils m’ont donné et j’ai essayé de faire de mon mieux. C’était un véritable cadeau. C’est le plus beau rôle qu’on m’ait offert pour le moment. Je jouais deux personnages si différents au cours d’une même saison. J’ai adoré chaque minute de cette expérience.

Quand avez-vous appris que vous n’étiez pas seulement Jay Garrick ?

Je le sais depuis juin 2015, peu de temps avant le tournage. En réalité, avant d’accepter cette offre, j’ai reçu un appel des scénaristes pour m’expliquer leur plan pour la saison. C’est là que j’ai appris que j’allais jouer à la fois Jay Garrick et Zoom. Je ne me rendais pas compte de l’importance et de la responsabilité de ce rôle. Je connaissais un peu le personnage de Jay Garrick, notamment son look avec le casque ailé. Mais je ne connaissais pas du tout Zoom. Je fais quelques recherches, pour être sûr que les scénaristes aiment ce que je faisais. Et apparemment, ça a plu… (rires)

Etiez-vous le seul à connaître ce secret ?

J’ai été le premier à l’apprendre, parmi les acteurs. Puis ils ont commencé à demander aux scénaristes : « Qui est Zoom ? Â» et ils leur ont dit petit à petit. À un moment, on pensait tous qu’ils pouvaient changer d’avis. Il y a un laps de temps entre le début du tournage en juillet et la révélation six mois plus tard. Quand ça a été révélé, certaines personnes ont été déçues sur le plateau. Elles m’aimaient bien en tant que Jay et elles ne voulaient pas le voir partir. Mais c’est tellement plus amusant de jouer un vilain ! J’étais ravi !

Lorsque vous tourniez, preniez-vous en compte le fait d’être double ?

C’est une bonne question. Oui, parfois, quand j’étais Jay, j’essayais. Si vous regardez à nouveau les premiers épisodes, vous pouvez vous dire : « Sa réaction est étrange Â» ou « Son regard est bizarre Â». Je gardais ça en mémoire. J’ai tenté de distiller sa double personnalité.

Le personnage de Zoom est en réalité interprété par trois acteurs : Tony Todd (la voix), Ryan Handley (la doublure sous le masque) et vous-même. En plus, Zoom requiert beaucoup d’effets spéciaux. Cela a-t-il été difficile ?

Une autre bonne question ! (rires) Tony Todd joue depuis plus longtemps que moi. J’ai toujours su qu’il serait parfait pour cette voix. Et Ryan, qui a fait la plupart des cascades, m’a beaucoup aidé. Je l’ai observé. il a une forte présence. Je n’ai jamais douté de ces deux hommes. Je savais qu’ils seraient parfaits. C’est agréable quand on me félicite pour mon interprétation mais Zoom est en réalité 3 acteurs. C’est un travail d’équipe. C’était amusant d’être l’un d’eux.

En février prochain, on vous retrouvera dans 24 : Legacy (spin-off de 24 heures chrono, NDLR). Peut-on espérer vous revoir dans The Flash ?

J’espère ! Je ne sais pas encore. Les deux séries se tournent à deux endroits différents : 24 à Atlanta et The Flash à Vancouver. Et c’est aussi sur deux chaînes différentes… J’aimerais revenir. Même pour un seul épisode. Je me suis tant amusé sur Flash. En plus, le Black Flash apparaît au cours de la saison. C’est un personnage important de la mythologie. J’aimerais bien revenir pour l’interpréter pourquoi pas !

Bon, mais on ne va pas vous laissez comme ça, sans revenir sur l’aspect « comics ». Non seulement c’est notre sujet premier chez Comic Box mais il éclaire en plus la situation sous un certain jour, pour peu que l’on comprenne les références. Depuis le début de la saison 2, les scénaristes du show n’ont pas cessé de jouer avec le concept de Terre 2 et, pour les fans de comics, injecter Jay Garrick revenait à s’attirer d’emblée un capital sympathie et un concept connu. Terre 2, les lecteurs de DC connaissent bien, c’est le monde associé avec la Justice League, où vivent les premières versions de Flash, Green Lantern et de bien d’autres héros. Mais pour autant le terme n’a pas toujours été utilisé dans ce sens. Dans la classification de DC Comics, il y aussi une Terre 3, où habitent des versions maléfiques des héros de DC. En 2000, alors que DC semblait avoir tourné le dos au système des réalités multiples, Grant Morrison et Frank Quitely décidèrent de recréer le monde maléfique dans JLA: Earth 2.

Comme plus aucune autre Terre n’existait, au lieu d’être Terre 3, celui-ci devenait donc, par défaut, Terre 2. Or, si on regarde bien la saison 2 de Flash, les criminels arrivés de Terre 2 sont pour la plupart des… reflets maléfiques de personnages plus connus pour les activités héroïques. On a vu ainsi débarquer Doctor Light, mais aussi Reverb et Killer Frost (reflets criminels de deux des plus proches allies de Flash). Même le Harrison Wells de Terre 2 est, en quelque sorte, une version inversée de celui que l’on voyait dans la saison 1 (quand bien même il s’agissait d’un imposteur). Mais surtout Atom-Smasher et Sand, deux criminels venus de Terre 2 sont, dans les comics, des héros membres de la Justice Society, groupe auquel appartient aussi Garrick. Ce qui revenait quand même à planter des indices que dans ce monde les « héros » de la Justice Society ne l’étaient pas du tout, qu’on était dans un cas de figure à la Terre 3 et que par conséquent… Ce Jay Garrick n’était pas forcément un saint.

Un autre aspect trompeur avec lequel les scénaristes ont bien joué pour brouiller les pistes repose sur l’usage même du nom Zoom. Ce personnage dans les comics est lié au Reverse-Flash mais n’est pas spécialement connu pour tromper son monde avec des impostures. Si bien que l’idée de si Zoom était secrètement l’un des alliés d’Allen n’a pas spécialement travaillé la majorité du public, au moins dans les premiers épisodes de cette saison. En utilisant le nom de Zoom, les auteurs ont mieux caché leur véritable structure. A bien des égards et malgré son apparence télévisée, le Zoom du show a plus à voir avec un personnage venu des comics et lié à Jay Garrick mais bien moins connu. Le Rival ou parfois le « Rival-Flash » est à l’origine un ennemi apparu dans Flash Comics #104 (février 1949).

Il s’agit d’un adversaire de Jay Garrick qui a les mêmes pouvoirs que lui et qui en profite donc pour porter un costume très similaire, histoire de lui coller ses crimes sur le dos. Revenu dans l’ère moderne dans des épisodes de JSA (co-écrits, comme par hasard, par Geoff Johns, qui supervise les actuelles séries TV de DC), le Rival est à bien des égards l’ennemi de Garrick qui a le mieux survécu. Et dans une saga de la série Impulse, le Rival trompe une nouvelle fois son monde en imitant cette fois un autre héros rapide amis de Flash, Max Mercury. Si l’on fait abstraction de l’apparence, ce Zoom a donc tout d’un Rival dans le comportement. Pour vous qui suivez la série TV dans sa traduction française, cela peut vous laisser croire que Zoom-Rival a remplacé son adversaire et que le visage de Teddy Sears est aussi sous le masque de fer. Nous vous dirons juste que la situation est autre et que Sears a seulement deux rôles/noms dans la série, pas trois. Il vous faudra suivre la série jusqu’à la fin de saison pour saisir les nuances.

Pierre Bisson

(un grand merci à l’équipe de Super-Heroes Con II pour les conditions dans lesquelles nous avons pu rencontrer Teddy Sears. Retrouvez nos interviews des deux acteurs d’Arrow dans Comic Box #102)