Avant-Première VO: Review Silver Surfer #14

Avant-Première VO: Review Silver Surfer #14

26 octobre 2017 Non Par Xavier Fournier

Cette semaine marque la fin du Silver Surfer de Dan Slott et Mike Allred, mettant un terme à deux volumes d’une collaboration fructueuse qui aura vu ce qui est peut-être le run le plus marquant sur ce personnage depuis… Lee et Buscema ? Et tout cas c’est le plus chargé en émotion depuis les sixties. Car sans rien enlever à ce qu’ont fait des Englehart ou des Starlin, qui utilisaient le Surfer en le définissant par ses adversaires, les menaces rencontrées, Slott et Allred en ont fait le centre d’une histoire d’amour douce-amère. Et toutes les histoires d’amour ont une fin…

Silver Surfer #14Silver Surfer #14 [Marvel Comics]
Scénario de Dan Slott
Dessins de Mike Allred
Parution aux USA le mercredi 25 octobre 2017

Il y a quelques mois de cela, alors que les comics de DC marquant le centenaire de Jack Kirby se multipliaient et que certains pouvaient logiquement se demander ce qu’il en était de Marvel, j’écrivais dans un de mes textes que le King était à l’origine de tellement de personnages de Marvel qu’il y avait déjà bien des séries marquées de l’ombre de Kirby même si on le percevait moins, du fait de l’habitude. S’il fallait choisir un comic-book Marvel qui honore le plus l’œuvre de l’artiste sans pour autant en faire des tonnes, cette version du Surfer semble sans doute LA série de l’année. Encore qu’il faille bien s’entendre. Le Surfer « messianique », noble sauveur venu des étoiles, celui que tout le monde apprécie en retenant sa larme de nostalgie, ce n’est pas le Surfer de Kirby mais plutôt celui de Lee et Buscema, qui en dressaient un portrait bien particulier. Kirby, lui, en introduisant le Surfer dans les pages des Fantastic Four, n’avait pas pensé à un messie mais plutôt à un étranger non-humain qui ne savait ni manger ni dormir. C’est sur cette fibre d’étrangeté, sur un individu qui doit tout (re)découvrir, même les sentiments les plus élémentaires, que Slott et Allred ont orienté leur run, non sans avouer (jusque dans ce dernier épisode) une filiation certaine avec Doctor Who et sa logique de « compagnons ». Cette fin de saga se lit donc comme on regarderait une fin de saison de Dr. Who, avec le sort de Dawn, la compagne du Surfeur, qu’il convient de régler. Comme déjà vu dans le précédent numéro, le sort d’une humaine au côté d’un immortel, c’est comme comparer l’éphémère et l’éternité. Et là-dessus, clairement, Slott enfonce le clou dans le rapport avec Who au point qu’on peut faire bien des comparaisons avec les sorts de Rose Tyler et de Clara Oswald dans la série TV. La finalité de Dawn résonne avec les adieux du Docteur et de Rose à Bad Wolf Bay… Mais pour autant que les approches soient voisines, ce n’est pas vraiment un problème car ce qui importe est que Slott et Allred arrivent à véhiculer des sentiments aussi forts que contradictoires.

« This is the end of our story, Dawn, know this… »

Ce qu’ils arrivent à faire, c’est jongler avec le chaud et le froid, avec les attentes du lectorat, installer le Silver Surfer dans une position qui démontre à quel point on peut être seul sans l’être aimé… et encore plus lorsqu’on a l’éternité devant soi. Ce n’est pas réellement, peut-être, ce que Kirby avait en tête en introduisant l’alien à la planche (encore qu’il existe dans Dawn certaines qualités qu’avait Alicia Masters, premier « amour » terrestre du Surfer). Mais dans cette ampleur de la générosité, dans cette envie épique de l’autre, il y a des sentiments du King. Et s’il en fallait d’autres preuves, même certaines scènes prennent un air symbolique. Pour qui sait bien y regarder, il y a un peu d’Arthur Clarke dans le sort de Dawn, un peu de 2001 dans ces extra-terrestres qui regardent le soleil se lever sans savoir ce qu’il signifie. Tout au plus le Surfer de Slott et d’Allred (décidément très axé Kirby cette année) n’a pas, comme bande son, du Richard Strauss tonitruant. Il lui faut quelque chose de plus intime. Comme du Arvo Pärt. Mais quoi qu’il en soit les deux auteurs emmènent jusqu’au bout la version la plus délicate, émouvante, du Surfer que l’on ait lu depuis des décennies. Et si vous l’avez manqué, il va vous falloir vous ruer sur les recueils de cette série désormais terminée et élégante de bout en bout ! A la fin nous voici , nous les lecteurs, comme le Silver Surfer, seuls avec nos souvenirs mais libres de revivre une nouvelle fois le passé.. Comme le Daredevil de Waid et Samnee, comme le Thor de Walt Simonson, ce Surfer-là est fait du bois dans lequel on taille les classiques…

[Xavier Fournier]