Avant-Première VO: Review Bug! The Adventures Of Forager #3

Avant-Première VO: Review Bug! The Adventures Of Forager #3

18 juillet 2017 Non Par Xavier Fournier

Oubliez tous les programmes de variantes consacrés à Jack Kirby, les promesses de one-shots ou même le Kamandi Challenge. Le meilleur hommage à l’œuvre de Jack Kirby de cette année de centenaire c’est à ce jour la minisérie Bug! The Adventures Of Forager, produite par la famille Allred. Ou le retour d’un personnage secondaire associé aux New Gods, Forager, qui a le chic pour croiser d’autres créations du King ou tout au moins des héros qu’il a marqué de son empreinte.

Bug! The Adventures Of Forager #3Bug! The Adventures Of Forager #3 [DC Comics/Young Animal]
Scénario de Lee & Michael Allred
Dessins de Michael Allred
Parution aux USA le mercredi 12 juillet 2017

Forager, c’est l’émissaire du peuple-insecte qui vit sous le sol de New Genesis, l’occasion pour Jack Kirby de montrer, dans les 70’s, que même ses « bons dieux » n’étaient pas dénués d’une certaine lutte des classes et même d’une portion de racisme que l’auteur dénonçait. Tout au plus Kirby avait insinué que Forager n’était pas vraiment qui il semblait être (peut-être un véritable Nouveau Dieu ?) mais la série s’était arrêtée avant que le King puisse creuser la chose. Des années plus tard, Forager fut sacrifié dans la série Cosmic Odyssey de Jim Starlin et Mike Mignola. Dans le cadre de Young Animal, label à la « Vertigo classique » qui entretient un rapport très particulier à la continuité (c’est déjà manifeste dans la série Doom Patrol), Mike Allred et son frère Lee (avec Laura, l’épouse de Mike, à la couleur) en profitent pour s’intéresser à ce personnage laissé pour compte, en profitant des portes laissées ouvertes par Kirby. Ce n’est pas un reboot mais une suite directe des évènements de Cosmic Odyssey : revenu mystérieusement à la vie, Forager réalise qu’il y a plein de choses qu’il ignore sur lui-même. Il se retrouve alors à voyager dans l’espace-temps via un boom-tube propres aux New Gods. A chaque nouvelle époque explorée, Forager a le chic pour tomber sur des personnages que le King a créé ou réinventé. A ce titre, les deux premiers épisodes ont été un véritable festival, où l’on croisait aussi bien le Sandman du Golden Age que les Losers (*) ou même le Blue Beetle des années 40 (Kirby en a dessiné le strip quelques temps). Les lecteurs les plus attentifs auront remarqué aussi que la généalogie d’une même famille semble jouer un rôle dans l’histoire. Pour ce troisième épisode, néanmoins, les références se centrent sur un seul personnage méconnu, l’éphémère Atlas the Great, que Kirby lança en 1975 dans les pages de First Issue Special. Les frères Allred s’amusent d’ailleurs beaucoup avec cette idée de « First »…

« Who carries canned chili aroud in a stuffed animal?! »

Pour les Marvelophiles, disons qu’Atlas The Great n’est jamais qu’un autre nom pour le Forgotten One/Gilgamesh des Eternals… C’est un personnage un peu à mi-chemin entre Conan et Hulk, ce qui vous donne une idée du charisme plutôt bourrin du bonhomme. Là où les deux épisodes précédents reposaient sur une sorte de défilé de héros différents, Bug! The Adventures Of Forager #3 confronte le protagoniste de la série et la petite fille qui l’accompagne (qui structurellement me fait un peu penser à celle aperçue dans Silver Star, autre série de Kirby) à un type qui, au demeurant n’a pas grand-chose à dire. Mais c’est justement l’occasion pour Forager de souffler un peu devant un feu de camp et de mieux discuter avec ses compagnons de route. A l’inverse, les frères Allred profitent d’Atlas pour montrer que même un colosse (caractérisé surtout pas son complexe de supériorité) peut être relié à une trame globale. Pour le coup, les Allred ont un peu la même approche du King que Grant Morrison, c’est à dire profiter du fait que Kirby lui-même avait placé quelques indices pour montrer que, par exemple, les New Gods étaient nés des cendres de l’Asgard de Marvel ou que Darkseid était le grand-père de Captain Victory. Si bien que l’idée maîtresse est donc d’établir des connexions en un sens généalogiques entre les personnages et les séries, avec toujours le principe que des choses que l’on connaissait sous un visage en ont en fait un autre dans le grand répertoire étendu de Kirby. Atlas n’est pas le meilleur « client » qui soit. Il est moins flamboyant que d’autres. Mais justement c’est là que la série montre un peu mieux son mécanisme, avant que Forager reparte vers d’autres figures kirbyesques. Les Allred revisitent le passé, certes, mais sans nostalgie triste, au contraire dans l’idée de montrer qu’il y a encore une vie débordante, un vrai sens du fun, dans ces créations.

[Xavier Fournier]

(*) Insistons sur le fait que les Losers ne furent pas une création de Kirby et que les épisodes datant d’avant sa reprise valent aussi le détour. La récente sortie en VF des Losers semble avoir convaincu certains lecteurs que *seuls* ces épisodes furent dignes d’intérêt. Il y a des choses très bonnes AUSSI dans les Losers « non-Kirbyesques »).