Marvel’s The Punisher – rencontre avec Jon Bernthal et Steve Lightfoot

Pierre Bisson

Marvel’s The Punisher – rencontre avec Jon Bernthal et Steve Lightfoot

Marvel’s The Punisher – rencontre avec Jon Bernthal et Steve Lightfoot

Pierre Bisson
18 novembre 2017

Il y a quelques semaines, dans le cadre de la promotion de Marvel’s The Punisher, l’acteur Jon Bernthal (qui incarne Frank Castle à l’écran) et Steve Lightfoot (le showrunner et scénariste de la série) étaient de passage en France. Maintenant que la série est disponible depuis hier sur Netflix, nous proposons cette discussion avec celui qui se glisse dans la peau du Punisher… et celui qui a écrit ce qui se passe dans la tête du personnage.

Les fans du Punisher sont légion. Est-ce que ça vous a influencé pour écrire la série ?

Steve : Le Punisher existe depuis 40 ans. Il y a eu de multiples versions du personnage. Donc tout le monde a forcément une pression particulière. J’avais l’avantage d’avoir vu ce que Jon s’était approprié le personnage dans la deuxième saison de Daredevil. Cette férocité mélangée à une humanité. Quand je me suis à travaillé sur l’écriture de la série, j’essayais de ne pas penser à cette pression. Je me disais : « Je vais faire la meilleure série possible ». Et en me plongeant dans cet univers, je me suis rendu compte de l’importance de cette licence. Aujourd’hui, je suis très nerveux et j’attends leurs réactions ! (rires)

Jon, cette fois-ci, vous êtes la star de la série. Aviez-vous plus de pression ?

J’avais déjà pas mal de pression la dernière fois (pour Daredevil saison 2, NDLR). Et maintenant, c’est encore pire. Je prends ce rôle très au sérieux. Le personnage parle aux militaires, aux policiers et également aux fans. Comme Steve l’a dit, c’est en ce moment que la pression monte : avoir fini le tournage et attendre la réaction du public. Je veux que ça affecte les gens. Je me suis très attaché à Frank. C’est différent ce que j’ai fait dans Daredevil : raconter ses origines tout en restant mystérieux. Il était plus dans l’ombre que sur le devant de la scène. Il fallait montrer toutes ces facettes : perturbé, silencieux, au combat… Steve a mis tout ça en avant. Il le met dans de situations où il ne se sentirait pas à l’aise. Et tant que Jon, je me sentais souvent mal à l’aise (rires). Donc, oui, j’ai plus de pression !

Marvel's The Punisher - rencontre avec Jon Bernthal et Steve Lightfoot

Frank Castle joue de la guitare régulièrement dans la série. Quelle serait la chanson parfaite pour décrire l’évolution du Punisher ?

Jon Bernthal : J’écoutais une chanson particulière avant certaines scènes. Pour me mettre dans l’ambiance. Mais je ne dirai pas laquelle ! (rires) La musique aide vraiment à rentrer dans un rôle. Steve me disait que la série représente son lien avec sa fille. Je m’en suis souvenu et je l’ai utilisé pendant le tournage. On a fait de longues prises de 15-20 minutes avec la guitare, dans l’entrepôt. C’était intense.

Steve Lightfoot : La musique est très importante de la série. Même Netflix a assuré en choisissant la chanson de Metallica pour la bande-annonce. Je n’ai rien à voir là-dedans mais j’ai adoré.

Certaines scènes sont à la fois violentes et graphiques. Comment avez-vous abordé ces séquences particulières ?

Jon : Pour moi, elles ne sont pas complexes. Elles ne sont pas gratuites. Il n’y a rien dans le script qui ne soit pas justifié. Il n’y a pas de scènes « outrancières », trop sanglantes. Dans les séries TV actuelles, on l’a impression qu’il faut toujours une bonne dose d’hémoglobine. Mais nous n’avons pas cherché à faire ça. C’est un personnage qui s’interroge tout le temps, il se remet en question. Il doute de lui-même. Il se déteste. Sa vie est dirigée par la douleur et le chagrin. Il sait plus que quiconque ce que coûte la violence. C’est un paradoxe. Je trouvais ça très intéressant qu’il puisse temporairement calmer la bête en lui grâce à la violence. C’est une sorte de drogue. Mais il ne le fait pas sans raison. Il se demande toujours s’il doit agir ainsi. C’est très humain. Je ne crois pas que nous soyons allés trop loin.

Marvel's The Punisher - rencontre avec Jon Bernthal et Steve Lightfoot

Le Punisher se distingue des autres justiciers Marvel/Netflix. Il est plus violent, il agit par vengeance. Pensez-vous que le public pourra s’attacher à lui comme à Jessica Jones ou Daredevil ?

Steve : C’est un personnage tellement complexe. C’est ce qui était excitant dans la phase d’écriture. Jon peut jouer tellement de facettes de Frank, c’est parfait, en plus ! (rires) Frank est loyal, honnête. Il est le meilleur ami qu’on puisse avoir. Mais il a aussi cet autre aspect de lui, créé par la tragédie qui le frappe. Il décide de régler ses problèmes en tuant les responsables. J’espère que le public découvrira l’humanité qui se cache en lui et finiront par avoir de la sympathie pour lui. Je ne pense pas qu’ils doivent être d’accord avec toutes ces actions, ils n’ont pas à croire qu’il a raison, s’ils comprennent d’où il vient. En construisant la série, on s’est dit que ce n’était pas grave si les spectateurs n’étaient pas en phase avec ses choix de temps en temps. C’est un type qui a perdu sa famille. On peut tous s’identifier aux sentiments accompagnant le deuil. J’espère qu’ils le suivront dans son périple.

« C'est un fantôme »

Vous êtes vous inspiré d’une saga particulière des comics Punisher ?

Steve : Non, c’est une histoire originale. Nous n’avons jamais eu l’envie de raconter une aventure particulière de la mythologie des comics. Je m’en suis beaucoup inspiré, bien sûr. Je suis un grand fan de certains éléments du comic-book. Mais l’arc narratif est inédit.

Jon, comment vous êtes-vous préparé pour le rôle ? De l’exercice ?

Jon : De la musculation ? (rires)
Steve : Il adore ça ! (rires)
Jon : Oui, de l’exercice, de l’entraînement au tir et au combat. Ça demande du temps, mais j’aime ça.
Steve : Et apprendre à jouer de la guitare, ça t’a tué ! (rires)

Marvel's The Punisher - rencontre avec Jon Bernthal et Steve Lightfoot

Le personnage a évolué depuis le dernier épisode de Daredevil. Il change de vie, brûle son costume dès les premières minutes. C’était nécessaire de repartir de zéro ?

Steve : Les quelques types qu’il tue au début de la série sont la résolution de sa vengeance. Je voulais qu’il en ait fini avec ça. Mais ce n’était pas simplement pour repartir de zéro. Quand on le revoit, c’est un fantôme qui vit à New York. Il a atténué sa peine et il ne sait pas comment aller de l’avant. Il s’interroge. Est-ce que ce qu’il lui est arrivé est sa faute ? Est-ce à cause de ce qu’il a fait à Kandahar avec l’armée ? C’est une chose en suspens. Si vous avez vu la série, vous savez que Frank fait ce rêve de la mort de sa famille. Inconsciemment, il se croit responsable. Dans Daredevil, on savait qu’il voulait éliminer les trois groupes qu’il considère comme meurtriers de sa famille. Mais dans notre show, Frank cherche son propre pardon. Ça n’arrivera jamais, je pense… Ce n’est pas tant qu’il se pardonne, mais qu’il accepte sa part de responsabilité.

Jon : C’est une bonne question. Je vais dans le sens de Steve. Dans la saison 2 de Daredevil, on parle de sa réaction après la perte de sa famille. C’est un homme avec une mission. Il a un but. Il est inflexible. Il se dit : « Je vais traquer et tuer tous les responsables. ». Pour moi, c’était en accord avec le militaire sur le terrain. Quand ils sont au combat, ils sont sereins. Ils ont un objectif. C’est les moments qui suivent qui sont durs pour eux. Quand ils sont chez eux, quand ils n’agissent pas, quand ils doivent se reposer. Dans ma tête, durant toute la saison 2 de Daredevil, Frank ne dort presque pas. Je voulais qu’il boive constamment du café pour montrer qu’il reste éveillé. Il a tant à faire. Pour lui, la vraie guerre commence quand il tue le dernier type du cartel. Frank reste seul avec lui-même. Il cauchemarde et se rend compte que tout ça ne finira jamais.

Steve : C’est pour ça qu’il prend ce job d’ouvrier et qu’il tape douze heures par jour sur le béton avec sa masse.

Marvel's The Punisher - rencontre avec Jon Bernthal et Steve Lightfoot

Le groupe de soutien de Curtis pour les vétérans est un élément majeur dans la série. Il est là pour les aider. Mais Frank ne cherche pas l’aide de son ami. Il choisit sa propre voie. Comment vous êtes-vous mis dans cet état d’esprit ?

Jon : Les scènes avec le groupe de soutien étaient très particulières pour moi. Les vétérans dans ces scènes sont de véritables vétérans. Pour moi, la série est pour ces personnes. Quand vous entrez dans cette pièce, c’est une sensation étrange. Après tout, je ne suis qu’un type qui met du maquillage et récite son texte. Ces gars se sont sacrifiés pour leur pays, pour la liberté. J’étais très content qu’ils soient là. J’ai tissé des liens avec eux. Pouvoir être avec eux et leur parler… Steve était là aussi… C’était un moment que je n’oublierai pas.

Steve : Pour moi, c’était les scènes les plus dures à tourner. Si ces vétérans se disaient : « Mais qu’est-ce qu’il veut dire là ? »… Mais ils étaient plutôt en accord avec nos propos, donc tant mieux.

« La saison 2 ? J'y pense tout le temps »

Dans Daredevil, vous êtes l’anti-héros, limite le vilain. Pensiez-vous avoir votre propre série où le Punisher serait le héros ?

Jon : Vous savez, les gens de ce métier sont malins ! (rires) Ils ne font rien au hasard. Je pense que c’était dans l’air… Je n’aime pas trop me projeter. Je ne pensais qu’au tournage de Daredevil. Je suis du genre « J’espère que tout ira bien mais je me prépare au pire Â». J’étais déjà tellement inquiet de trouver le ton juste pour Frank dans Daredevil. Et quand l’annonce de la série TV Punisher a été confirmée, je n’ai pas crié « Wouhou ! Â», j’étais plus tôt : « Putain, ça va être dur Â» ! (rires) Je ne suis pas du genre à sauter au plafond.

Steve : Pour moi, c’était étrange d’écrire le script en ayant déjà mon acteur principal. Je n’avais pas à imaginer quelqu’un dans le rôle. Jon avait déjà joué le personnage et je me disais : « J’espère qu’il aimera ce que j’écris Â».

Pensez-vous déjà à la saison 2 ?

Steve : J’y pense tout le temps ! (rires) J’adorerais le faire. Pour l’instant, nous n’en sommes pas là. Si la saison 1 est un succès, ils nous laisseront recommencer. Je suis prêt en tout cas.

Steve, vous avez travaillé sur Hannibal. C’est également un tueur. Cette expérience a-t-elle influencé le Punisher ?

Steve : Un peu. Sur Hannibal, j’ai appris que si votre protagoniste était complexe et avec un détail universel, le public peut s’identifier à lui. Les meilleures séries créent leur propre code moral et ce n’est pas forcément celui de notre société. Regardez des séries comme Breaking Bad, Les Sopranos, Hannibal… Et je parle de bonnes séries TV, je ne dis pas que nous jouons forcément dans la même cour… (rires). Dans Sopranos, vous aimez Tony Sopranos qui dans une autre série serait le vilain. On se dit : « C’est un type qui fait ça pour sa famille ». Hannibal est avant-tout un solitaire. Il veut trouver un ami qui le comprend. Pour Punisher, c’était un homme en deuil. Et je voulais que le public le comprenne. Pour une bonne série, il doit y avoir quelque chose auquel le public puisse s’identifier.

[Pierre Bisson]

Retrouvez notre ICI critique de la première saison de Marvel’s The Punisher.

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