Oldies But Goodies: More Fun Comics #60 (Oct. 1940)

16 janvier 2010 Non Par Comic Box

[FRENCH] A l’heure où sont rédigées ces lignes « Blackest Night » bat son plein aux USA, des revenants envahissent l’univers DC armés d’anneaux noirs et le Spectre (qui comme son nom l’indique est un personnage fantomatique) est concerné au premier chef. En se replongeant dans le passé, cependant, on mesure à quel point depuis les années 40 tout disposait le Spectre à figurer dans cette « saga des anneaux »…

Le Spectre est potentiellement le personnage le plus puissant de l’univers DC dans le sens où sa seule limite est le plus souvent l’imagination des scénaristes. Lancé en février 1940 dans More Fun Comics #52, ce héros est la création  du scénariste Jerry Siegel (connu pour être le co-créateur de Superman) et du dessinateur Bernard Baily (qui lui illustrerait quelques semaines plus tard les premières aventures d’Hourman). Les origines du Spectre étaient exceptionnelles dans les comics de l’époque puisque le policier Jim Corrigan recevait essentiellement ses pouvoirs en mourant : Après s’être fait assassiné, l’esprit de Corrigan est intercepté par une puissance divine invisible (mais souvent symbolisée par un grand éclat de lumière) surnommée la Voix (ou bien « la Présence » dans d’autres épisodes). Si vous êtes croyant vous avez tout le loisir de vous imaginer que la Voix est votre dieu de référence mais globalement la Voix évoque quand même un peu plus le dieu commun aux trois grandes religions monothéistes. La Voix et sa manière d’intervenir rappelle, entre autres choses, la manière qu’à Dieu de s’adresser à Moïse (1). Les personnages qui sont accueillis au Paradis mais auxquels on annonce que « leur temps n’est pas venu » avant de les renvoyer sur Terre ne sont pas rares dans la culture populaire. De nos jours, les téléspectateurs en ont encore la preuve de nos jours à chaque fois que, dans les publicités, l’ange John Malkovich propose au pauvre George Clooney de « s’arranger » pour échapper à la mort… Mais dans le cas du Spectre il faut bien faire une distinction : Jim Corrigan n’est pas réellement rendu à la vie. C’est son fantôme qui retourne sur Terre et fait semblant d’être vivant sous la forme de Corrigan, pourchassant les criminels sous l’aspect surpuissant du Spectre (bien plus tard l’explication serait modifiée, faisant que le Spectre est un esprit à part entière, distinct de Corrigan ou de son fantôme mais qui « vit » une sorte de relation symbiotique avec lui).

Quand on lit les premiers épisodes de Superman dans Action Comics, on voit bien que Siegel n’était pas du genre à définir d’emblée les limites de ses héros : C’est ce qui a fait que les pouvoirs de Superman (qui à la base n’avait aucune vision aux rayons X et encore moins réellement la capacité de voler) ont évolués à pas de géant. Pour le Spectre, le principe est le même mais de façon encore plus poussée. Siegel fait pratiquement grandir le concept d’épisode en épisode. Dans More Fun Comics #51 (c’est à dire un mois avant la publication de la première histoire du Spectre) une première publicité montre le héros en costume : un esprit à la peau grise (un peu comme la trilogie des films Fantômas d’André Hunebelle) vêtu d’une tenue (un slip, une cape et des gants) bleue. En dehors de l’absence de cagoule, le « code vestimentaire » est alors très proche de celui de Batman. Et c’est cette apparence qu’on retrouve sur la couverture de More Fun Comics #52, DC ayant visiblement décidé de s’adresser aux fans de super-héros. Le problème est que Siegel, lui, avait visiblement une autre idée. Si l’origine de Superman avait été rapide (à peine quelques cases pour expliquer sa provenance avant de le lancer dans son premier exploit), celle du Spectre donne lieu à un véritable feuilleton qui, toutes proportions gardées, n’est pas sans évoquer la lenteur relative avec laquelle Brian Michael Bendis racontera plus tard les débuts de son Ultimate Spider-Man. Car si le Spectre est bien sur la couverture de More Fun Comics #52, à l’intérieur on y trouve seulement Jim Corrigan. Il est effectivement tué et « revient » se venger avec des pouvoirs surnaturels mais l’idée d’adopter un costume de super-héros ne semble pas lui traverser l’esprit avant la fin de More Fun Comics #53. Autant dire qu’à ce stade les lecteurs voyaient depuis trois mois un super-héros nommé le Spectre sur les couvertures et les pages de promotion alors qu’ils lisaient les exploits d’un Jim Corrigan qui semblait déterminé, lui, à rendre la justice en costume de tous les jours. Qui plus est, quand l’apparence super héroïque sera enfin adoptée à l’intérieur des histoires, elle ne sera pas totalement identique à ce qui avait été vu sur les couvertures. Peut-être justement à cause de la ressemblance et des risques de confusion avec Batman, le costume allait virer au vert. La peau grise subsisterait pendant quelques épisodes mais s’éclaircirait rapidement au point de devenir blanche. En résumé on peut prendre la première année des aventures du Spectre et noter presque un signe d’évolution à chaque épisode. Le syndrome est encore plus poussé pour le Spectre que dans le cas de Superman parce que ce dernier, malgré sa super-force, mesurait encore ses aptitudes dans un registre physique. Le Spectre n’a aucune limite. Non seulement il est mort mais ses pouvoirs lui viennent d’une entité toute-puissante (la Voix) qui n’est pas réellement définit. Le registre des aptitudes du Spectre est alors énorme et ne cesse d’augmenter : il peut grandir et devenir un géant, se rendre immatériel, voler, se téléporter… Le Spectre peut fait tout ce qui passera par la tête de Jerry Siegel ou de ses successeurs sans avoir à se justifier puisqu’il est le Spectre et que cette condition s’auto-suffit.

Et pourtant il semble que rapidement Jerry Siegel ait eu des doutes sur le niveau de puissance de son personnage, ce qui nous amène plus spécialement à l’épisode qui nous intéresse, à savoir More Fun Comics #60, paru alors que le personnage avait à peine six mois d’existence. Le Spectre a déjà fait sa mue visuelle, il a la tenue verte et la peau blanche mais il reste des indices de l’inspiration batmanienne du personnage (et qui remonte sans doute aussi à un ancêtre commun, le Shadow), comme cette manière commune de ramener la cape devant le visage, pour apparaître plus mystérieux. En guise de définition, le lecteur ne trouve que quelques lignes (« Personne ne sait que Jim Corrigan, détective au poing dur, est en réalité le Spectre, dont la mission est de débarrasser de ce monde du crime ») qui ne délimitent en rien ses pouvoirs et montrent bien que le Spectre peut, potentiellement, tout faire. Ce n’est pourtant pas de lui qu’on nous parle en premier mais d’un train de nuit, le Black Chief Limited, qui transporte ce soir-là la plus grosse réserve d’or jamais transportée par voie ferroviaire. Bien entendu la sécurité est poussée au maximum… Mais tous les cordons de sécurité du monde n’y pourraient rien quand le train, étrangement, commence à disparaître, comme s’il s’engouffrait dans un tunnel invisible. Les policiers sont médusés et s’exclament qu’un tel exploit peut n’être que le seul résultat d’une sorcellerie. Il ne reste plus que trois agents consternés à côté des rails, sans aucune trace du train… Quand leur apparaît la titanesque silhouette du Spectre avant de disparaître aussi vite. Pour la police, c’est clair : C’est le Spectre qui a fait le coup ! Non seulement il a été vu mais ses pouvoirs rendent possibles cet étrange hold-up.

Sauf que ce n’est qu’au réveil, en lisant le journal du matin pendant son petit déjeuner, que Jim Corrigan a vent de l’affaire. La presse fait ses gros titres sur le fait que le Spectre a kidnappé le train. Et de nombreux témoins ont vu l’esprit vengeur sur les lieux. Ce qui est incompréhensible car Jim Corrigan, lui, sait qu’il n’y était pas ! Le comble est atteint quand Corrigan arrive au commissariat où il travaille : on lui confie l’enquête sur la disparition du Black Chief Limited ! Cela dit, la chose arrange bien le héros puisque, sa curiosité piquée, il était bien décidé à voir de quoi il retournait.

Songeur, Corrigan s’engouffre dans l’ascenseur après avoir salué le groom, Sylvester (Un commissariat avec un garçon d’ascenseur ? Je ne parierais pas sur le fait que la chose ait été très répandue à l’époque). C’est d’ailleurs l’occasion d’un passage un tantinet raciste. Le dénommé Sylvester est représenté avec un faciès caricatural, parle avec un accent à couper au couteau et est tellement occupé à commenter que le fait que la disparition du train est due à des fantômes qu’il parle seul, sans réaliser que Jim Corrigan. Non pas que ce dernier soit escamoté comme le train, non, il a décidé de se lancer dans l’enquête et de devenir le Spectre. Sylvester, remarquant seulement plus tard qu’il est seul dans la cabine, est terrassé par la surprise. Intérieurement, le Spectre s’en veut d’avoir ainsi terrifié le groom mais se dit qu’il ne pouvait révéler qui il est (oui, cher Spectre, mais l’alternative aurait été de se dématérialiser dans un lieu à l’écart, sans témoin, de manière à ne pas avoir à pas effrayer les gens ni à expliquer plus tard cette disparition).

Transformé en Spectre mais flottant dans les rues dans un état invisible, le héros dérive ainsi tout en ressentant une étrange attraction qu’il ne s’explique pas. Il est attiré vers une voiture où il découvre des gangsters sur le point de commettre un hold-up dans une bijouterie. Les criminels s’engouffrent dans la boutique et tirent sur le manager alors qu’il allait déclencher l’alarme. Heureusement le Spectre, bien qu’invisible, est là pour intervenir. D’un geste, il transforme la balle en papillon. La vie du manager est sauvée et les bandits, incapables du coup de menacer le bijoutier, s’enfuient en voiture, rapidement pris en chasse par un véhicule de la police. Le Spectre lui aussi poursuit les gangsters mais bientôt leur voiture semble disparaître dans l’air, comme le Black Chief Limited la veille. La différence, c’est que cette fois-ci le Spectre est vraiment là pour s’engouffrer à la suite de la voiture et disparaître lui aussi dans une sorte de néant ténébreux. La voiture roule dans les ténèbres jusqu’à un énorme globe qui abrite une ville (dans laquelle on voit le Black Chief Limited). Le Spectre entre dans la ville-globe à la suite de la voiture et accompagne, toujours invisible, les gangsters jusqu’à leur maître, un individu dénommé Xnon (un vieil homme en armure, drapé dans une cape rouge). Visiblement avant de quitter la bijouterie les bandits ont pu prendre un plein sac de joyaux. Ce qui satisfait pleinement Xnon…

Visitant le globe, le Spectre remarque que l’équipe du Black Chief Limited a été réduite en esclavage et travaille sous la menace d’être fouettée. Le Spectre s’interpose et retourne le fouet contre un des gardes. Hélas en agissant ainsi il a révélé sa présence et Xnon se matérialise à ses côtés en lui ordonnant de s’arrêter. Le Spectre est surpris car il est resté invisible et Xnon sait cependant le reconnaître. Xnon explique alors qu’il sait de nombreuses choses, parmi lesquelles le fait qu’il est plus sage pour ses affaires de s’arranger pour que le Spectre soit accusé de ses crimes. Le Spectre pense ne faire qu’une bouchée de son adversaire mais Xnon lève ce qu’il appelle un bâton de puissance, le forçant à devenir visible et, pire, à obéir au moindre de ses ordres. « La science contre le surnaturel ! Et la science est triomphante ! Ma volonté est la tienne ! » s’exclame Xnon. Il est donc établi que la base de sa puissance est scientifique mais on remarquera qu’on n’en sait guère plus sur Xnon. S’agit-il simplement d’un savant fou ? Une sorte de Doctor Doom du Golden Age revêtu d’une armure bourrée de technologie ? Ou bien, comme son nom bizarre semble l’indiquer, Xnon serait un extra-terrestre issue de cet étrange monde-globe ? Rien ne confirme ou n’infirme une de ces deux hypothèses. Tout comme il se refuse à définir clairement les limites du Spectre, Jerry Siegel ne décrypte pas plus la nature de son adversaire. On remarquera par exemple que rien n’explique comment Xnon a été capable de singer l’apparence du Spectre au tout début de l’épisode…

L’important, néanmoins, c’est que le Spectre est désormais l’esclave de Xnon, qui le renvoie « sur Terre » (impliquant bien que la ville-globe ne se trouve pas sur notre monde) avec l’ordre de détruire les forces de police qui, justement, défilent pour une parade. Le Spectre est obligé d’obéir et se dirige vers la Terre tout en se lamentant : « un meurtre en masse ! Je ne dois pas le commettre ! Je ne dois pas ! Mais l’influence de Xnon ne peut pas être combattue ! ». Le Spectre aurait-il finalement trouvé plus fort que lui ? Le héros se matérialise sur Terre sous la forme d’un géant titanesque, près à écraser les policiers à ses pieds. Le Spectre lève la main et commence à émettre des éclairs mortels qui se dirigent vers la foule. Dans la rue, c’est la terreur, les policiers fuient devant la menace. Dans quelques secondes le pouvoir du Spectre fera ses premières victimes… Quand tout à coup le Spectre est élevé dans les airs, dans une sorte de rayonnement psychédélique avant l’heure. Le héros disparaît dans les ténèbres et se retrouve dans une sorte de vide. Il a été transporté par une puissance supérieure avant d’avoir pu tuer quelqu’un.

Mais comment ? Une lumière apparaît devant lui. C’est la Voix : « Jim Corrigan, le Spectre… Nous t’avons convoqué pour avoir un compte-rendu de tes activités sur Terre ». Ce « nous » pose question. La Voix n’est-elle qu’une seule entité qui parle d’elle à la troisième personne du pluriel (comme certains monarques) ou bien est-elle seulement le porte-parole d’un groupe. Là aussi Jerry Siegel est peu explicite. Et on notera que si la Voix est une manifestation divine, comme le laissaient penser les premiers épisodes, alors curieusement elle n’est pas omniprésente et a besoin de convoquer son champion à intervalles réguliers pour être tenue au courant de ses actions sur Terre. Respecteux, le Spectre commence par expliquer qu’effectivement il pu empêcher de nombreux crimes sur Terre et punir les coupables. Mais que maintenant il fait face à un adversaire qui utilise une « science noire » qui menace de le réduire en esclavage. La Voix peut-elle l’aider ? La réponse se fait attendre (ce qui laisserait à penser qu’il y a une sorte de conciliabule en dehors du champ de vision du Spectre. Finalement la Voix se fait entendre à nouveau et un anneau brillant apparaît au doigt du héros. La Voix explique : « Tu as désormais l’Anneau de la Vie… et de la Mort ! Aucun mécanisme inventé par l’homme ne peut lui résister ». Le Spectre constate alors que le sortilège scientifique de Xnon se dissipe et qu’il n’est plus sous son influence.

Aussitôt le Spectre s’envole à destination de la ville-globe. A nouveau invisible, il entre dans la salle du trône de Xnon où ce dernier est en train de jubiler. Il est convaincu que le Spectre est en train de massacrer tous les représentants de la Loi. Voyant que l’adversaire ne soupçonne pas qu’il a repris sa liberté, le Spectre s’en va tranquillement jeter un « sort d’indifférence » au reste de la bande de Xnon. Il peut ainsi libérer tous les prisonniers et les ramener à bord du Black Chief Limited. Il a ensuite tout le loisir de ramener le train sur Terre, sous les yeux ébahis des policiers qui étaient convaincus que c’était le Spectre qui les avait enlevé. Ne reste plus, ensuite, qu’à retourner affronter Xnon. L’adepte de la science a tôt fait de remarquer que son bâton de puissance n’a plus aucun effet sur le héros. Et la riposte du Spectre est sans pitié : d’une simple pensée il déclenche la destruction du globe et de la ville qu’il abritait. Tous les criminels qui l’habitaient sont détruits sur le champ… Sauf Xnon qui est protégé par les propriétés de son armure. Un corps à corps s’engage entre les deux ennemis, jusqu’à ce que le Spectre attire une météorite dans laquelle il emprisonne Xnon, visiblement destiné à dérivé dans l’espace pour l’éternité…

Jim Corrigan peut alors reprendre sa vie de tous les jours. Au commissariat, on « l’informe » bien sûr de la libération du train. Un des hommes que le Spectre a libéré (Wayne, sans rapport avec Bruce Wayne) et qui se trouve être le co-équipier de Corrigan avance que le personnage n’est peut-être pas aussi mauvais que la police le pense. Mais leur chef ne veut pas entendre ce discours. Une fois le chef parti, Wayne tente de convaincre Corrigan mais ce dernier est obligé de maintenir la comédie : « Peut-être que tu dit vrai, Wayne ! Mais c’est mon devoir de le capturer et je ne me reposerait pas tant que je ne l’aurais pas fait ». Jim Corrigan n’était pas prêt de trouver le repos mais le Spectre, lui, pouvait dormir sur ses deux oreilles puisque l’homme chargé de le capturer n’était autre que lui-même.

La grande innovation de ce numéro, l’Anneau de Vie, allait être utilisé semi-régulièrement dans les mois suivants. Identifié comme « l’Anneau de Vie et de Mort » lors de sa première apparition, il resterait connu sous le seul nom du « Ring of Life ». Globalement, l’Anneau de Vie allait servir au Spectre pour augmenter sa puissance à chaque fois qu’il tomberait sur une menace dépassant ses capacités (pourtant déjà énormes). Mieux, en janvier 1942 (More Fun Comics #75) l’Anneau de Vie servirait à réellement ressusciter Jim Corrigan, changeant la formule de la série. A partir de là le Spectre serait un esprit habitant le corps d’un Jim Corrigan vu comme un personnage indépendant. Certains épisodes (All-Star Comics #2) montreraient également qu’il était possible de prendre possession du Spectre (un peu comme Xnon l’avait fait) en s’emparant de l’Anneau de Vie, qui était donc un surplus de puissance mais également un talon d’Achille déguisé. Un adversaire nommé Kulak y arriverait d’ailleurs brièvement. On voit qu’au début des années 40 cet accessoire occuperait une position capitale dans la mythologie du Spectre. Dans les années 60, cependant, quand le personnage fit son retour, les responsables de DC perçurent évidemment que le Spectre était assez puissant comme ça. Et l’Anneau de Vie ne serait pratiquement pas mentionné, comme s’il n’avait jamais existé. Ce ne serait que bien plus tard que les auteurs révéleraient que l’Anneau de Vie avait disparu, perdu dans une sorte de portail entre les dimensions.

Si on se place dans la perspective des années 40, l’apparition de l’anneau avait sans doute une explication simple. En juillet 1940 DC avait lancé le premier Green Lantern (Alan Scott) dans All-American #16. Green Lantern allait se révéler plus populaire que le Spectre. Il est fort possible que l’apparition miraculeuse de l’anneau du Spectre soit causée plus ou moins volontairement d’un personnage qui semblait attirer le public. Mais d’une manière générale, comme nous l’avions vu en abordant le cas de Diamond Jack, les anneaux magiques étaient déjà assez populaires dans les comics même avant l’arrivée de Green Lantern. Et à plus forte raison après. D’ailleurs on noterait quelques mois plus tard qu’un autre héros publié dans More Fun Comics, Doctor Fate, hériterait à son tour d’un anneau magique (ce qui fait qu’à un certain moment les rangs de la Justice Society comporteraient, entre Green Lantern, le Spectre et Doctor Fate, trois propriétaires d’anneaux). De même que l’anneau noir de Diamond Jack pourrait s’apparenter à celui d’un Black Lantern, l’Anneau de Vie du Spectre pourrait tout à fait s’intégrer dans la cosmogonie développée par Geoff Johns ces dernières années dans Green Lantern et dans Blackest Night. Mais dans un rôle inverse de celui des Black Lanterns et de leurs anneaux exploitant la mort. Le Spectre, qui a la peau blanche, se voit confier un Anneau de Vie par une puissance positive, symbolisée par une lumière claire et éclatante. Qui plus est, l’anneau permet au Spectre (qui est un esprit désincarné), quand il le possède, d’échapper à des cas de possession… Là où les anneaux noirs, eux, possèdent les cadavres des défunts. L’Anneau de Vie semble en tout point l’opposé des anneaux des Black Lanterns, qui plus est porté par un personnage à la peau blanche. De là à imaginer que l’Anneau de Vie est potentiellement un « anneau blanc » qui peut être porté par l’équivalent d’un « White Lantern », il n’y a qu’un pas… que les scénaristes de DC Comics franchiront peut-être un jour ?

[Xavier Fournier]

(1) Et ce n’est d’ailleurs pas la première référence culturelle à Moïse dans les écrits de Jerry Siegel puisque l’origine de Superman (avec ses parents qui lui permettent d’échapper à la mort dans une sorte de berceau-fusée avant qu’il soit élevé par un autre peuple) évoque également énormément ce modèle religieux.